Valérie Chevalier: réconfortante solitude

Valérie Chevalier vient de publier son neuvième roman, <em>Antoinette</em>.

Il y en a peu, des personnages qui affirment leur désir de solitude aussi bien que l’héroïne du nouveau livre de Valérie Chevalier, Antoinette. Un roman doux et enveloppant, qui fait du bien à lire en cette période de l’année où l’on a parfois envie de se réfugier dans le cocon douillet de son chez-soi.


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L’autrice ne se le cache pas, elle a plutôt l’habitude d’imaginer des personnages «plus expansifs». «C’est mon neuvième roman et j’avais envie d’explorer autre chose… un personnage qui vit à l’intérieur d’elle-même, qui passe un peu inaperçu auprès des autres. Je pense beaucoup dans la vie et, en vieillissant, je parle de moins en moins et je pense plus en plus», dit-elle avec douceur.

Ce personnage, c’est Antoinette. Une jeune femme qui déteste son prénom et qui décide de s’effacer plutôt que d’être à la hauteur de celui-ci, explique Valérie Chevalier. Elle trouve son bonheur dans la solitude, elle a peu d’amis et préfère les aventures sans lendemain.

Mais Antoinette a beau être introvertie, elle n’est pas gênée pour autant, faut-il préciser. Et c’est ce que l’un de ses amants d’un soir remarquera – avec surprise, parce que comme l’écrit l’autrice, les gens confondent souvent gêne et introversion.

«Antoinette n’aime pas se justifier. Et sa façon de ne pas avoir à le faire ou de ne pas avoir à expliquer ses choix, c’est de se retirer puis de se dire: “Je m’en fous de ce que les gens pensent. Si je n’ai pas d’amis, personne ne va me juger.”»



«J’avais envie de réfléchir à la société dans laquelle on vit: les attentes que les gens ont envers nous, à quel point on se montre sur les réseaux sociaux… On se raconte beaucoup, on se partage beaucoup, et j’avais envie de montrer ce personnage un peu décalé, Antoinette, qui n’a pas envie de le faire.»

—  L'autrice Valérie Chevalier

Lorsque ses deux seules amies se mettent à porter un jugement sur sa vie – et sur son célibat volontaire –, la jeune femme en vient pourtant à douter de ses choix.

Ce besoin de solitude, Valérie Chevalier confie le ressentir également, par moments.

«Antoinette se pose la question: est-ce qu’elles m’encouragent pour mon bien, parce qu’elles me connaissent et qu’elles pensent que ça va être préférable pour moi, ou est-ce que c’est teinté de leurs propres valeurs? Je pense que dans la vie, il faut se poser la question sur les conseils qu’on donne, aussi», estime Valérie Chevalier.

D’un extrême à l’autre

Ce besoin de solitude, l’autrice confie le ressentir également, par moments. «J’ai vraiment ces deux côtés-là en moi. Mais à l’extrême, je pense. Je fais des animations, des projets humoristiques, parfois un peu décalés, ironiques. Je suis présente dans la sphère médiatique et c’est un métier qui me nourrit énormément.

«J’aime les gens, je crée des contacts facilement, je suis curieuse… mais j’ai aussi l’écriture et le silence de la création. Il y a des moments où je dois me retirer. C’est vraiment un équilibre», dit-elle.

<em>Antoinette</em>, de Valérie Chevalier

Ce qui frappe d’emblée dans son roman, c’est l’absence de réseaux sociaux, de longs pavés en texto, de coups de téléphone… «J’avais envie d’un roman qui ne parle pas de tout ce que j’utilise, lance-t-elle en riant. C’est peut-être mon échappatoire! Antoinette a peu de relations humaines, en fait, autres qu’avec elle-même. J’avais envie de parler de l’amour de soi, aussi.

«Il y a plein de gens qui sont introvertis dans la vie et on les met souvent dans une case – on pense qu’ils ont peut-être moins de facilité à entrer en contact avec les autres ou juste moins de popularité –, alors qu’il y en a qui sont juste profondément bien là-dedans.»

Valérie Chevalier a d’ailleurs commencé à affirmer son propre besoin de solitude il y a une dizaine d’années. Sporadiquement, précise-t-elle, à certaines personnes.

«Plus les gens étaient proches, plus je me sentais mal de le nommer. En même temps, j’ai travaillé sur le fait que quelqu’un qui t’aime et qui veut que tu sois bien va accepter et peut-être être content que tu lui mentionnes cette vérité qui peut être souffrante à nommer parce qu’on ne veut pas blesser.

«C’est dur, mais c’est nécessaire», conclut-elle.