
Sara Létourneau défolklorise la sorcière
«Il y en a 28, comme les 28 jours du cycle menstruel. Chaque matin, à notre arrivée à Espace virtuel, on prépare du thé à la framboise qui est versé dans ces verres», raconte Anick Martel, coordonnatrice artistique chez Bang.

Puisque c’est le genre d’exposition où il faut vraiment regarder pour voir, examinons maintenant les courtepointes alignées sur le mur voisin. Ce qui ressort au premier chef, ce sont les nuances de noir que comporte cet ensemble. Elles émanent des pièces de vêtements rassemblées par l’artiste afin de confectionner ces oeuvres. Ensuite seulement, à condition de s’approcher à quelques pieds, on remarque des lignes dans le tissu. Des lignes qui sont des mots, des phrases. Une incantation.
Juste la dimension technique de cet ouvrage impressionne. Tant de patience. Tant d’habileté. Or, ce discours écrit à la machine à coudre est celui qu’on entend dans la pièce du fond, où ne perce qu’un rayon de lumière. Dans cet espace enveloppant, inquiétant, résonne une oeuvre sonore ayant pour titre La sorcière. C’est elle qui donne son sens à l’installation, ainsi que le confirme Anick Martel. « C’est une posture écoféministe. Il y a le rapport à la nature, à la femme puissante et à la liberté », énonce-t-elle.

On peut s’imaginer à une époque lointaine, en effet, assistant à une cérémonie païenne. Le vent souffle. Des gens chuchotent et de loin en loin, des phrases émergent, genre : «La sorcière redonne espoir.»
Cette dimension théâtrale rappelle que Sara Létourneau est également comédienne et chanteuse. En mobilisant tous ses talents, elle est parvenue à défolkloriser la sorcière, qui vaut mieux que l’image qu’on en donne à l’Halloween ou dans les films de Popeye.