Estimant avoir été lésées dans le cadre de leurs relations d’affaires avec BRP, l’américaine Electrical Components International (ECI) et l’entreprise britanno-colombienne Promark Electronics lui réclament un total de 9,5 millions $CA en dommages et intérêts. Ce montant correspond à leur estimation de pertes de revenus encourues et de dépenses de main-d’œuvre, de même que la valeur d’équipements qui auraient été achetés expressément pour répondre aux besoins de BRP.
Précisons que les faits allégués n’ont pas encore passé le test des tribunaux. Interpellé par La Tribune au sujet de cette poursuite, BRP a indiqué qu’il s’agit d’un litige commercial et que la poursuite suit son cours. « Nous avons la ferme intention de contester ces accusations et de nous défendre vigoureusement », a-t-on communiqué par voie écrite.
De leur côté, les avocats de Promark et ECI ont expliqué par écrit à La Tribune qu’« une entente est intervenue entre les parties en vertu de laquelle BRP choisirait Électroniques Promark, chef de file dans l’industrie des faisceaux de fils, comme fournisseur pour certains de ses véhicules » et qu’ « alors que les Demandeurs ont investi d’importantes sommes d’argent afin d’assurer la réussite de ce projet, BRP a unilatéralement décidé de mettre brusquement fin à l’entente. »
« Nos clients, bien que déçus par l’approche adoptée par BRP, ne souhaitent pas commenter davantage les procédures en instance devant la Cour supérieure par respect pour le processus judiciaire », a-t-on également ajouté.
« Tournure inattendue »
Selon la demande introductive d’instance, rédigée en anglais, les trois entreprises avaient conclu une entente, en juin 2022, qui stipulait que Promark deviendrait le fournisseur exclusif de harnais électriques pour la production 2023 des Spyder de BRP, à condition que « les termes et conditions clés » de l’entente soient respectés. ECI, qui évolue comme fournisseur de systèmes de distribution électriques, d’assemblages de boîtiers de commande et d’autres composantes d’ingénierie, aurait pour sa part agi comme partenaire de Promark dans le cadre de cette entente.
Des bons de commande auraient par la suite été produits par BRP, notamment pour l’achat de matériaux et équipements requis pour cette production, ainsi que pour commander officiellement 38 types de pièces à Promark. La somme promise pour la production des pièces se seraient élevée à plus de 8,5 millions $ US, tandis que les frais d’équipement et de matériel se seraient élevés à 479 000 $ US avant taxes.
Selon Promark et ECI, celles-ci auraient « dûment rempli à tout moment pertinent les termes et conditions clés de l’entente, sans mentionner tous les autres termes et conditions stipulés ».
Néanmoins, selon les parties poursuivantes, le 23 décembre 2022, « dans une tournure inattendue des événements et à la grande surprise des plaignantes », BRP aurait communiqué à Promark et ECI « sans aucune formalité » qu’elle avait résilié le plus important bon de commande, en vertu d’une section précise de ses termes et conditions.
ECI et Promark s’y seraient fermement opposées et auraient, quelques semaines après, reçu une lettre de BRP les invitant à « esquisser une proposition commerciale » en lien avec cette résiliation.
Dans ce que les poursuivantes qualifient de « tentative de [BRP] de modifier illégalement les termes et conditions stipulés dans l’entente », cette proposition aurait indiqué que ECI n’avait pas été en mesure de rencontrer les conditions de l’entente, comme 32 des 38 types de pièces produites n’avaient pas complété leur processus d’homologation avec succès et qu’elles devaient être livrées en octobre 2022 en vue du début de la production des Spyders en janvier 2023.
ECI et Promark soulignent que l’entente indiquait plutôt que « Promark et BRP travaillent avec diligence et bonne foi pour atteindre un essai pilote réussi d’ici le 17 octobre 2022, ou le plus tôt possible pourvu qu’il y ait une communication constante entre les parties [traduction libre] ».
Seuls 102 570 $ US, en lien avec l’achat de matériel et équipement, auraient été versés jusqu’à maintenant par BRP, selon les demanderesses.
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La version de BRP
Dans l’exposé sommaire des moyens de défense modifié de BRP, dont La Tribune a obtenu copie, l’entreprise maintient que certaines conditions de la lettre d’entente n’ont pas été respectées et qu’il « était compris et convenu que les harnais électriques étaient requis dès le début de la production du premier MY23 Spyder », soit au plus tard le 5 janvier 2023.
La lette d’entente affichait également que Promark devait « rencontrer ou excéder les exigences de BRP en [termes] de capacité, de délai de mise en œuvre, de point de livraison, de qualité et de compétitivité technique [traduction libre] » et que si un ou plusieurs objectifs n’étaient pas rencontrés, BRP fournirait un avis de non conformité formel écrit à Promark, avec un délai de dix jours pour remédier au manquement. BRP se serait ainsi estimée en droit de résilier l’entente.
« Promark a échoué à livrer ne serait-ce qu’une seule des pièces PPAP [NDLR homologuées] visées [...] en vue [de l’essai pilote du 17 octobre 2022] », peut-on lire dans le document rédigé par les avocats de BRP.
« La réclamation de Promark et ECI est mal fondée; les dommages réclamés sont grossièrement exagérés et indirects », concluent-ils également.
Le dernier passage de cette cause devant le tribunal remonte au 8 septembre dernier, alors que le dossier a été transféré, à la demande de BRP, du district de Montréal vers celui de Bedford. La date de reprise des procédures n’est pas connue.
BRP a enregistré des revenus annuels au-delà de 10 milliards $ pour une première fois lors de son exercice s’étant clos le 31 janvier 2023.