Québec priorise la lutte aux incendies et la récolte du bois brûlé avant un programme d’aide

Les entreprises forestières ont développé une solide expertise de récolte du bois brûlé. Elles sont parvenues à récolter des volumes importants lors du feu des Passes dangereuses de l'été 2021. La récolte a débuté en juillet et a pris fin dès les premiers rayons de soleil du printemps suivant avec le développement des larves de longicorne.

Le gouvernement du Québec envisage un programme d’aide aux entreprises qui composent la chaîne d’approvisionnement de l’industrie forestière, mais priorise pour le moment la lutte aux incendies et la récolte du bois brûlé.


Au cours d’un entretien avec Le Quotidien, le directeur adjoint du cabinet de la ministre des Ressources naturelles et des forêts (MRNF) Maïté Blanchette Vézina, Jean-Simon Campbell, a confirmé qu’une réflexion concernant un programme d’aide était en cours, mais qu’il faudrait attendre avant d’en arriver là.

« Cette semaine est déterminante avec ce que la météo annonce. Nous avons maintenu les interdictions de circuler en forêt à l’exception du retrait des équipements forestiers ou des personnes qui doivent demeurer dans les endroits pour protéger des infrastructures. Nos priorités sont, pour le moment, la lutte aux incendies et la récolte du bois brûlé », insiste le directeur adjoint.

Le cabinet de la ministre est conscient que la situation commence à être particulièrement difficile pour bon nombre d’entrepreneurs forestiers qui ont été dans l’obligation de cesser les activités de récolte et transport de bois ainsi que la voirie forestière depuis au moins trois semaines. Ils ne retourneront pas en forêt avant au minimum une semaine et peut-être plus dans certains cas. Dans un communiqué publié mardi, le Bloc québécois exhortait le gouvernement fédéral d’instaurer un programme d’aide d’urgence.

La ministre des Ressources naturelles et des Forêts Maïté Blanchette Vézina priorise pour le moment la lutte aux incendies et la récolte du bois brûlé.

Le directeur adjoint du cabinet de la députée de Rimouski a indiqué que le gouvernement allait devoir tenir compte du fait que les entrepreneurs ont aussi des assurances pour ce qui touche les dommages aux équipements. Il y a toutefois l’arrêt des opérations causé par un un élément naturel qui fait en sorte que toute l’infrastructure industrielle a, du jour au lendemain, cessé les opérations comme ce fut le cas pendant la pandémie de COVID-19 dans certains secteurs économiques.

La lutte contre les incendies est entre les mains de la SOPFEU. Le MRNF a de son côté commencé la cartographie des feux dans les endroits ou les brasiers sont éteints. Jean-Simon Campbell mentionne qu’il y aura trois journées de cartographie pour les feux dans les unités d’aménagement du Lac-Saint-Jean cette semaine et que l’opération se poursuivra dans les autres régions quand la il sera possible de le faire.

La situation diffère dans les unités d’aménagement du Nord du Québec et l’Abitibi ou les feux sont toujours actifs et ou la situation peut encore se détériorer puisque dans l’ensemble, les indices sont extrêmes : «Dans certains endroits, les indices sont élevés et peuvent tourner à extrême rapidement», reprend Jean-Simon Campbell.

Au cours de l’entretien avec Le Quotidien, il n’a pas été question des conditions du programme de récupération du bois brûlé. Depuis la fin des années 1980, le gouvernement du Québec a déployé des programmes spécifiques de récolte de bois brûlé avec des modalités financières puisque ce type de récolte génère des coûts additionnels pour le tapes de coupe et de transformation ainsi qu’une baisse de valeurs des produits mis en marché.

Le Quotidien a tenté d’obtenir des commentaires officiels de l’industrie au cours des dernières heures. Les commentaires se font rares, mais il ressort que la priorité pour les industriels est d’obtenir de rentrer rapidement dans les zones de bois brûlé sans avec le moins de restriction administrative possible et évidemment des compensations pour les coûts additionnels. Aucune réaction n’avait été faite au cours de la journée de mardi, mais tôt mercredi matin, l’Alliance forêt boréale a réagit dans un court communiqué, appuyant l’idée d’un programme d’aide financière, que ce soit pour la perte de machinerie ou la perte de revenus, demandant également de la souplesse de l’assurance-emploi pour les travailleurs ainsi qu’un programme de subvention salariale pour les entreprises afin de garder leurs employés et ainsi éviter l’exode.

« Nous saluons l’initiative du Bloc Québécois et nous y ajoutons notre voie pour demander au gouvernement fédéral et au gouvernement provincial de mettre en place des programmes d’urgence tant pour les entreprises forestières que pour les travailleurs. Bien qu’il faille planifier rapidement la récupération d’un maximum de matière brûlée tout en assurant la remise en productivité des sites, la priorité #1 des gouvernements devrait être la survie des entrepreneurs forestiers et le maintien à l’emploi des travailleurs car sans eux, tout le secteur forestier s’effondrera », estime le président de l’organisme de concertation de défense des communautés forestières Yanick Baillargeon.

La récolte de bois brûlé génère des coûts additionnels. Dès le début du processus, l'opérateur d'abatteuse doit ralentir la cadence pour bien évaluer l'état de chaque tige récoltée. Il a en plus à remplacer plusieurs fois par quart de travail la chaîne de la lame de tronçonnage qui ne résiste pas à la présence de carbone dans l'écorce brûlée.

L’autre grande préoccupation est la survie de toute l’infrastructure de la chaîne d’approvisionnement de l’industrie qui se compose de dizaines d’entrepreneurs qui n’ont pas la capacité financière de supporter pendant très longtemps un arrêt de travail. Un propriétaire de deux abatteuses confiait que l’arrêt forcé de ces deux machines représentait une perte financière de 50 000 $ par semaine.

En ce moment, entre 60 et 65 % des activités de l’industrie forestière qui transforme du bois résineux sont paralysées par les feux de forêt. Certaines entreprises planchent sur des fermetures additionnelles de scierie puisque les inventaires de bois rond dans les cours, constitués pour traverser l’arrêt annuel du printemps, fondent à vue d’œil. La fermeture de scieries a également des impacts majeurs pour l’approvisionnement des usines de papier et de pâte Kraft.