On peut la voir dans Les tricheurs, 23 décembre, Nouveau Québec, Norbourg et Frontières qui y était présenté en grande première, lundi dernier; tous des films tournés ces trois dernières années. «Je vous rassure, je n’ai pas fait cinq films en même temps, mais c’est à cause de la pandémie que tous les films sont sortis dans la même année.»
Carmen: une soeur comme Christine
Frontières: c’est ce long-métrage de fiction signé Guy Édoin qui ramenait l’actrice dans son patelin, à Trois-Rivières, où le film poursuivait sa tournée québécoise de projection en première. Jeudi soir, on le présentait au cinéma Le Tapis rouge en présence de trois comédiennes et du réalisateur, juste avant qu’il prenne l’affiche un peu partout au Québec vendredi.
Au milieu des deux frangines de son personnage Carmen, incarnées par Pascale Bussière (Diane) et Marilyn Castonguay (Julie), Christine Beaulieu ne se sent pas vraiment dépaysée. Elle-même étant la cadette d’une famille de filles, en sandwich entre l’aînée et les deux benjamines jumelles, elle n’est pas allée chercher bien loin la composition de son personnage.
«Toutes les familles sont différentes, mais Carmen, c’est comme Christine dans sa famille», décrit la comédienne. Et dans cette famille, c’est l’aînée jouée par Pascale Bussières qui se retrouve dans une situation de fragilité qui inquiète ses deux plus jeunes sœurs.
«C’est particulier, parce que normalement, la grande sœur, c’est elle qui est le pilier. Quand c’est l’aînée qui est chambranlante, c’est tout un déséquilibre qui se passe dans la famille et c’est ce qui se passe dans Frontières», raconte celle qui se reconnaît un rôle de rassembleuse au sein même de sa propre famille, en tant qu’enfant du milieu.
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«Je suis assez proche de Carmen, ce n’est pas compliqué pour moi de jouer Carmen, du tout, du tout. Je suis Carmen», dira-t-elle. Quelques minutes plus tard, elle en dira autant d’Isabelle, la mère-de-famille-cool-séparée-en-bons-termes-avec-son-ex qu’elle incarne avec bonheur dans L’oeil du cyclone.
Isabelle: la maman qu’elle serait
«Moi, c’est un de mes plus beaux cadeaux professionnels. C’est de la grosse, grosse joie. Grand bonheur! Quelle équipe!», affirme celle qui se sent, sur ce plateau, comme au sein d’une deuxième famille. Une famille qui continuera vraisemblablement d’évoluer à l’écran puisqu’une quatrième saison serait déjà sur la planche à dessin; tournage prévu en août prochain.
À 41 ans, Christine Beaulieu s’explique mal comment il se fait que la vie ne l’ait pas dotée d’enfants et fait d’elle une maman, elle qui se dit pourtant d’un naturel très maternel. «J’adore les enfants, les enfants m’aiment aussi, ils se collent à moi... Pour moi, c’est très facile depuis toujours», raconte la comédienne qui a commencé à garder des enfants très jeune et qui chérit ses relations avec ses neveux, nièces et filleuls.
Cependant, si elle avait eu des enfants, Christine s’imagine qu’elle serait un peu le genre de mère qu’est Isabelle avec Jade, Jules et Emma: «Je n’ai pas besoin d’en avoir moi-même pour savoir comme je serais, comment je ferais, comment j’aime…», explique la comédienne qui trouve aussi de l’inspiration chez les mamans que sont ses sœurs. «J’aime comment elles sont avec leurs enfants. Elles ont du fun dans la vie avec leurs enfants, elles ne sont pas trop sérieuses», observe Christine.
Le théâtre: un exercice de mise en forme
D’ici la fin du mois de mars, Christine Beaulieu montera sur les planches en s’inscrivant dans la création québécoise de la pièce Insoutenables longues étreintes au théâtre Prospero. Le texte le plus difficile que la comédienne n’ait jamais eu à apprendre est signé par le dramaturge russe Ivan Viripaev, un artiste exilé qui soutient ouvertement l’Ukraine. La mise en scène est de Philippe Cyr, son complice à la mise en scène de J’aime Hydro.
«C’est un projet pour stimuler la créativité et continuer d’entraîner son muscle d’actrice de théâtre. C’est de l’ordre de l’entraînement», illustre l’actrice formée à l’école de théâtre du Cégep de Saint-Hyacinthe. Pour elle, il y a sur scène quelque chose qui tient de la performance sportive pour laquelle il ne faut pas négliger de s’entraîner.
«C’est vraiment le théâtre mon carré de sable, mais jouer au théâtre, c’est plus physique… On dirait qu’il ne faut pas que tu lâches ça pendant trop longtemps sinon tu ne seras plus capable d’y retourner. C’est comme si ça me gardait en forme pour ce métier-là qui est l’art de la scène.» Un métier qui la garde bien occupée entre les plateaux de télé, ceux du cinéma et la scène théâtrale.
Sans oublier cette corde bien tendue à son arc qu’est la scénarisation particulièrement rompue au théâtre documentaire: après J’aime Hydro qui l’a conduit jusqu’à la Manic, ce sont Les saumons de la Mitisipu qui lui ont fait redescendre les rivières jusqu’aux Jardins de Métis l’été dernier. Dans cette performance, Christine Beaulieu adopte le point de vue du saumon, de l’œuf à l’âge adulte. Elle y raconte tout le trajet qu’il doit faire dans la rivière Mitis (Mitisipu en mi’kmaq) et tous les obstacles qu’il doit franchir, avec ou sans l’aide des humains que nous sommes.
Sophie Brochu: un triste dénouement pour Hydro et le Québec
La créatrice de J’aime Hydro, la pièce de théâtre documentaire à laquelle elle a consacré des années de sa vie, n’essaie même pas de cacher sa déception. Sa tristesse, même. Le départ de Sophie Brochu à la direction d’Hydro-Québec suscite de grandes questions chez la citoyenne et chez la dramaturge engagée qu’est Christine Beaulieu.
«C’est une grande rencontre dans ma vie. Je pense que c’est d’une grande tristesse qu’on la perde à la tête de notre société d’État», estime celle qui croyait avoir clôt le dernier chapitre de sa pièce, après y avoir intégré sa rencontre avec Sophie Brochu.
Mais l’histoire a mal tourné, avec la démission annoncée par la PDG au gouvernement du Québec, en janvier dernier. «C’est triste pour notre avenir énergétique, pour toutes les décisions qui ne se prendront pas selon ce qu’elle croit être la bonne avenue. Moi, j’avais confiance en elle. Je me disais: Hydro Québec est entre bonnes mains. Je l’avais ajoutée à mon spectacle depuis le mois d’août (…) Mon spectacle était fini avec elle, j’étais comme en paix», relate Christine Beaulieu.
Ce sentiment aura été de courte durée, ce qui place à présent la docu-scénariste devant de grandes questions: est-ce qu’il faut ajouter un nouveau chapitre à la pièce? Faudra-t-il suivre les développements de l’actualité énergétique à l’infini? « Ça change tellement vite le milieu de l’énergie que je ne peux pas constamment m’ajuster à la vitesse de l’éclair à tous ces changements-là», réfléchit-elle tout haut.
D’un autre côté, un tel projet porté pendant des années de recherche, de scénarisation et d’interprétation, c’est un investissement personnel qu’on n’abandonne pas si facilement. «C’est comme si J’aime Hydro était devenu une grosse, grosse, grosse introduction à tout ce qui se passe maintenant. Mais est-ce que cette introduction est encore pertinente à présenter? Tout me dit que oui...», indique la créatrice qui constate toujours l’engouement du public en salle.
«C’est une femme très impressionnante. Il n’y a pas mieux qu’elle, il n’y a pas plus compétente, il n’y a pas plus qualifiée, il n’y a pas plus pertinente que Sophie Brochu pour diriger Hydro-Québec au Canada ou en Amérique du Nord», considère-t-elle. «Peu importe qui va la remplacer, je suis désolée, c’est impossible d’accoter Sophie Brochu à la direction d’Hydro-Québec. Impossible!»
Tout un défi de casting pour la suite du feuilleton.