Vous connaissez fort probablement dans votre entourage un consommateur de bières de microbrasserie qui a amorcé ses découvertes il y a plus de 20 ans. Demandez-lui ses coups de cœur de l’époque et il vous nommera des bières bien maltées, riches, alcoolisées, souvent d’inspiration belge, et les qualifiera de bières fortes ou extra-fortes. C’est ainsi qu’on les nomme officiellement, car ce sont les exigences en matière d’étiquetage des boissons alcoolisées du gouvernement du Canada.
Vous connaissez également un consommateur de bières light, ultra et autres qui a toujours refusé de boire de la bière de microbrasserie, parce qu’elle a trop de goût ou qu’elle est trop forte. C’est le yin et le yang de la culture microbrassicole au Québec. Mais la culture évolue…
Le taux d’alcool moyen des bières de microbrasserie a tendance à baisser, c’est un fait. Je me suis amusé à comparer différents types de bière et à observer l’offre de plusieurs brasseries; la tendance penche vers le bas. Y a-t-il un lien avec la diminution de consommation et l’intérêt de plus en plus marqué pour les bières sans alcool ? La réponse semble beaucoup plus complexe, si on se fie aux décisions d’achat des consommateurs. Les bières fortes et extra-fortes n’ont plus la cote. Vive les bières « légères ».
Lorsque je demande aux consommateurs leur coup de cœur du moment, plusieurs aiment préciser qu’il existe différents moment de consommation. Un phénomène que l’on retrouve dans le vin et les spiritueux. On a toujours quelques « bonnes bouteilles » pour des occasions spéciales. Du côté de la bière, il ne semble pas y avoir cette même tendance en fonction du prix, mais plutôt du taux d’alcool et du taux de sucre résiduel. Sans compter l’intérêt de l’affinage et de l’offre produit.
Cela m’amène à remarquer que de très nombreux nouveaux projets brassicoles ont fait le pari de proposer des bières de « soif » plutôt que des bières plus maltées. On est dans les Pale Ales, lagers, pilsners et autres. Sur le marché, on retrouve encore des bières fortes et extra-fortes, sauf que les ventes ne suivent plus, à part quelques exceptions... et le marché de la bière vit encore de beaucoup d’exceptions. Et c’est sans compter les nombreuses variations d’IPA, passant de la Double IPA à la Session IPA. Mais avez-vous remarqué l’augmentation d’IPA « légères » sur le marché ? Les coûts de production y sont aussi pour quelque chose.
Est-ce un phénomène mondial ? En voyageant dans beaucoup de pays occidentaux, j’ai remarqué le phénomène chez nos voisins américains et en Europe occidentale. La vente de bière de « dégustation » en France et en Belgique, par exemple, se vit différemment qu’ici. Les grandes brasseries belges ont encore beaucoup d’influence sur les habitudes de consommation, mais force est de constater que leur volonté de proposer des bières fortes ou extra-fortes tient plus du savoir-faire que de l’intention de comprendre le marché. Les chiffres d’exportation semblent me donner raison.