Chronique|

Transferts en santé, l’autre raison de la résignation

Le premier ministre François Legault

CHRONIQUE / Il existe une autre raison à l’acceptation résignée de l’«offre» d’augmentation des transferts en santé par François Legault.


Une autre que les cinq que voici :

1) L’offre de 46 milliards $ sur 10 ans d’Ottawa pour l'ensemble du Canada était à prendre ou à laisser.

2) Comme ses homologues, M. Legault a estimé qu’il valait mieux prendre ce qu’il y avait sur la table afin de commencer à en bénéficier prochainement plutôt que de courir le risque de perdre encore une année ou plus (tout en se disant ou en espérant qu’il sera toujours temps de revenir à la charge avant la fin du plan fédéral de 10 ans).

3) Un gain a été obtenu en ce qui a trait à l’indexation annuelle du Transfert canadien en matière de santé. Celle-ci passera de 3 à 5% (bien que seulement pour les cinq prochaines années). Ottawa s’est par ailleurs engagé à ne pas exiger de conditions comme telles à ses nouveaux versements — ce qui est normal. Le contraire aurait constitué un coup de force politique de sa part.

4) Le front commun est à bout de forces. Il est allé au bout de ce qu’il pouvait produire. On a pu l’écrire dès la fin de la rencontre de Justin Trudeau avec les premiers ministres des provinces et des territoires, mardi dernier. L’assemblage se lézardait. Les jours qui ont suivi en ont fourni la preuve.

5) Enfin, plus fondamentalement, on peut rappeler qu’à la souque à la corde canadienne, il y a un gouvernement qui gagne presque toujours. Cette fois n’aura pas fait exception.

L’autre raison de l’acceptation résignée de l’«offre» insuffisante présentée par Justin Trudeau concerne très spécifiquement le gouvernement Legault : l’imagine-t-on refuser de signer une entente parce qu’elle l’empêcherait de financer convenablement le système de santé et de services sociaux alors qu’il s’apprête à baisser les impôts? Ce ne serait pas logique.

Le gouvernement Legault se ferait alors très rapidement dire, par bien des gens au Québec, de surseoir à son projet de réduire le fardeau fiscal des Québécois, une réduction qu’il entend concrétiser dans le budget 2023-24. Le ministre des Finances, Eric Girard, confirmera dans quelques semaines que les deux premiers paliers d’imposition seront réduits d’un point de pourcentage.

Déjà qu’un débat naîtra là-dessus, le gouvernement Legault fournirait lui-même des arguments à ceux qui s’opposent à ces réductions s’il se disait incapable de financer adéquatement tout le grand réseau de la santé à cause d’Ottawa.

On n’est pas à un illogisme près, mais celui-ci ne tiendrait pas la route.