La chaleur humaine envahissait la plage enneigée du parc et contrastait par le fait même avec le périple glacial auquel les explorateurs s’étaient livrés pendant la fin de semaine. Amis, conjoints, conjointes et proches étaient tous rassemblés près de l’arche d’arrivée pour prendre dans leurs bras leurs êtres chers.
« C’est énormément de fierté que je ressens quand je pense à la résilience et au courage des gens qui se sont lancés dans le défi. Avec le vent et les températures glaciales qu’on a connus, j’y vois un bel hommage aux gens atteints du cancer. Ça leur a définitivement permis de saisir une part de leur réalité dans le combat contre la maladie », atteste le directeur général de la fondation Sur la pointe des pieds, Jean-Charles Fortin.
Organisé depuis maintenant une dizaine d’années, l’événement d’exploration hivernale sur le lac Saint-Jean, qui vise à amasser des fonds pour l’organisation d’excursions et d’activités pour les jeunes atteints du cancer, n’a eu d’autre choix que de réviser son tracé habituel cette année.
« C’était impensable de faire marcher les gens vendredi sur le lac alors qu’il faisait un froid sibérien. Le trajet a donc été repensé, avec notamment un bout en forêt, pour que le tout soit responsable et sécuritaire. C’est pour cela d’ailleurs que l’arrivée a été déplacée vers Pointe-Taillon plutôt que vers Roberval pour cette première traversée. Les deux autres voyages se concluront bel et bien au village sur glace de Roberval », assure M. Fortin.
Cela n’a pas empêché les braves gens mobilisés de profiter à fond de l’expérience de camping sur les eaux du lac, samedi soir. « Les 24 premières heures ont été les plus difficiles de notre hiver. Conséquemment, on s’est adaptés, mais l’expérience a pu suivre son cours. Évidemment, quelques membres du groupe de la première traversée ont cependant dû abandonner pour leur santé », fait valoir le directeur général de la fondation.
Le choix d’arrêter
Martine Théoret fait partie de ces quelques participants qui ont dû se résigner à arrêter l’aventure en milieu de chemin. « Je partais de Sherbrooke pour faire le défi et je savais d’ores et déjà que la gestion du froid serait un enjeu, et ce, avant même de voir le froid extrême qui se préparait. Ultimement, je me suis aussi blessée donc je n’ai pas pu continuer avec ma gang », explique-t-elle.
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La Sherbrookoise est une amatrice de plein air, qui se voue à la cause du cancer. « Mon conjoint a le cancer. Je participe à des initiatives de la sorte depuis plusieurs années. C’est une réalité qui me parle beaucoup. Cette fois-ci, la différence, c’est que l’argent était dédiée à d’autres, à des jeunes pour qui la fondation a su changer leur vie et continuera de le faire. »
C’est après un vaillant effort, contre l’extrême froideur de l’hiver, que Mme Théoret s’est retirée de la traversée. « J’étais frustrée au départ c’est certain. Il fallait que je me parle. Je n’avais pas pu manger parce que je savais que le simple fait d’enlever ma combine pour m’alimenter me glacerait et que je perdrai la bataille contre le froid », se remémore-t-elle.
Après coup, celle qui faisait partie de l’équipe intitulée Aventurière du Nord s’est posée pour réfléchir. « Je me suis dit que j’étais chanceuse d’avoir eu le choix d’arrêter de me battre contre le froid. Les gens qui sont atteints du cancer, eux, n’ont pas le choix d’arrêter de se battre. Ils n’ont aucun contrôle sur ce qui leur arrive et c’est leur réalité à longueur d’année », formule Martine Théoret.
Une façon de redonner à la fondation
Maude Trottier, une jeune femme de 28 ans atteinte du cancer du sein, faisait partie de l’expédition. « En octobre, j’avais participé à une activité de la fondation et ça avait complètement changé ma vie, d’une façon positive. En participant à cette traversée en fin de semaine, c’était une façon pour moi de redonner. »
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Par sa résilience et par le partage de sa réalité aux autres aventuriers, Maude a servi de véritable catalyseur de motivation pour la troupe. « Mon objectif, c’était de donner un message d’espoir aux jeunes qui sont aux prises avec le cancer, mais aussi à leurs proches. Malgré la maladie, c’est possible de vivre de magnifiques expériences et celle-là en était la preuve », avance-t-elle.
Émue et heureuse à la fois, la jeune femme de 28 ans était bien contente de voir le séjour glacial se terminer, et ce, en dépit des forts liens qu’elle a pu tisser. « Ça n’a pas été facile au départ. Il a fallu que je dorme au chaud la première nuit pour ne pas me retrouver trop avancée dans l’hypothermie. J’ai par la suite rejoint le groupe et c’est là que j’ai pu véritablement échanger et sentir la force de tout un chacun. C’était magnifique de voir autant de gens se mobiliser dans des conditions aussi difficiles », lance-t-elle.