Cette lettre ouverte a été écrite par Anne-Marie Chapleau, des Mères au front du Saguenay.
Après une longue résistance, le gouvernement Legault annonçait en juin dernier qu’une aire protégée de 235 km2 serait enfin implantée dans le secteur de la rivière Péribonka. Tous les espoirs étaient désormais permis ! On annonçait du même coup la création d’un comité « avec des acteurs régionaux concernés », chargé de mieux définir le projet et sa réalisation. Quoi de plus raisonnable, en effet, que d’inviter « les acteurs régionaux concernés » ! Il allait de soi que le Comité de sauvegarde de la rivière Péribonka (CSRP) serait le premier à être invité. N’avait-il pas, depuis plus de 12 ans, acquis une connaissance fine du dossier et du territoire, développé une véritable expertise citoyenne sur la question, en plus d’y avoir consacré d’innombrables heures ?
Coup de tonnerre dans un ciel serein ?
Nous avons donc appris avec stupéfaction en septembre dernier que le CSRP n’avait pas été invité par Québec à siéger sur le comité de création de l’aire protégée. Comment cela était-il possible ?
En fait, il ne s’agissait pas vraiment d’un coup de tonnerre dans un ciel serein ; des acteurs s’éaient agités en coulisse pour fomenter cette exclusion. Cela devait être dévoilé dans La Presse du 26 octobre dernier : l’opposition venait d’élus municipaux de notre région. La pression qu’ils avaient exercée sur les décideurs avait été suffisante pour qu’ils obtiennent gain de cause. Au nom de quoi ? Certainement pas d’une meilleure protection du joyau qu’est le corridor de la rivière Péribonka ni d’un souci de protection de la riche biodiversité qu’il abrite. Non ! Mais bien plutôt pour défendre les intérêts économiques des forestières.
Des excuses fort bienvenues
Heureusement, l’un de ceux qui avaient oeuvré à l’exclusion du CSRP, Luc Simard, préfet de la MRC de Maria-Chapdelaine, dans un sursaut de conscience qui l’honore, a reconnu son erreur le 10 novembre et présenté ses excuses. Il s’est même dit prêt à collaborer avec le CSRP. À la bonne heure !
Un appel à M. Ouellet et à M. Savard
Une ombre plane cependant encore sur le succès de ce comité de travail. En effet, deux autres préfets n’ont toujours pas montré d’ouverture à travailler en toute collaboration avec le Comité de sauvegarde de la rivière Péribonka. Le ministère de l’Environnement, de la Lutte contre les changements climatiques, de la Faune et des Parcs a reconnu l’importance d’inclure le CSRP aux travaux du Comité régional ; il serait temps que Louis Ouellet (MRC de Lac-Saint-Jean-Est) et Gérald Savard (MRC du Fjord-du-Saguenay) confirment eux aussi leur ouverture à collaborer avec ces citoyens de notre région.
C’est à eux que nous adressons aujourd’hui formellement cette demande : Messieurs Ouellet et Savard, dites un oui sans ambiguïté à la participation du Comité de sauvegarde de la rivière Péribonka au comité responsable de la mise en valeur de l’aire protégée de la rivière Péribonka. Il y va de la réussite de son mandat.
Le Québec à l’heure de la biodiversité
Dans moins d’un mois, le Québec sera l’hôte de la 15e Conférence de l’ONU sur la biodiversité. C’est en effet à Montréal que se réuniront, du 7 au 19 décembre, les délégués du monde entier pour élaborer des objectifs et un plan d’action pour la protection de la biodiversité durant la prochaine décennie.
L’érosion dramatique de la biodiversité est certes un enjeu global et international. Mais il appartient à chaque nation, et même à chaque région, d’en faire un enjeu local prioritaire et de dire : « Oui, on s’en occupe dans notre cour. »
La création d’aires protégées est une manière privilégiée de le faire. Et le corridor de la Péribonka est certainement l’une des plus belles cours dont on puisse rêver !
En tant que Mères au front soucieuses de protéger le patrimoine naturel qui sera légué à nos enfants et petits-enfants, nous souhaitons ardemment que la société civile soit dignement représentée au sein du comité qui planifiera l’aire de la Péribonka. Le Comité de sauvegarde de la rivière Péribonka a abondamment fait ses preuves ; nous lui accordons pleinement notre confiance. Il est temps que tous les élus en fassent autant !