Selon Frédéric Laurin, les plateformes économiques des cinq grands partis qui s’affrontent durant cette campagne électorale proposent peu de choses sauf des mesures pour contrer l’inflation. Le professeur en économie de l’UQTR n’est nullement contre de telles mesures si elles sont bien ciblées, mais il faudrait aussi aborder davantage la relève entrepreneuriale, la compétitivité des entreprises et l’exportation.
«Il n’y a rien qui porte vraiment sur le développement socioéconomique du Québec ou de ses régions. Habituellement, il y avait toujours des éléments qui touchent l’innovation, la formation de la main-d’oeuvre. Il y a de petites affaires à gauche et à droite, mais ce n’est pas détaillé», commente M. Laurin à la suite de sa traditionnelle analyse des plateformes électorales en matière d’économie.
Rappelant qu’un gouvernement provincial ne peut combattre l’inflation, cette responsabilité relevant de la Banque du Canada, M. Laurin indique que le gouvernement du Québec peut aider ses citoyens qui sont durement affectés par l’inflation. Ces gens sont ceux qui ont de la difficulté à boucler leur fin de mois. C’est ce qui amène plusieurs partis à proposer des baisses d’impôt. Mais une telle proposition ne sera pas sans impact sur les finances publiques.
«C’est toute la population qui souffre, mais ceux qu’il faut aider sont ceux qui risquent de faire faillite, d’être sous-alimentés, d’être jetés dehors de leur appartement à cause de l’inflation. Le problème, et c’est relevé par beaucoup d’économistes, c’est que lorsqu’on fait des injections budgétaires (les baisses d’impôt) comme ça, on alimente l’inflation. Et on est actuellement en déficit, on a une récession qui nous attend peut-être au coin de la rue et on va baisser les impôts. Ça n’a pas de sens! Il faut d’abord payer notre déficit et se donner une marge de manœuvre pour affronter une possible récession, pour réparer notre système de santé, rénover nos écoles, nos infrastructures routières», croit M. Laurin, en soulignant que le vieillissement de la population générera des coûts en santé et aura un impact sur le personnel déjà en nombre insuffisant.
Parlant de manque de personnel, Frédéric Laurin estime que la pénurie de main-d’oeuvre mérite une stratégie gouvernementale ambitieuse. Il affirme ne voir aucune stratégie de la sorte dans les propositions actuelles. Selon lui, les effets d’un tel problème sont plus graves que ceux découlant d’une récession.
«Il y a des propositions, mais on ne ressent pas le sentiment d’urgence. Le Parti libéral du Québec est le seul à avoir détaillé un peu plus sur la pénurie de main-d’oeuvre. Eux prennent ça au sérieux, mais il y aurait eu moyen d’aller plus loin.»
Le PLQ finit premier
Dans le palmarès établi par Frédéric Laurin, le premier de classe est le Parti libéral du Québec. Le professeur en économie accorde une note de 8 sur 10 au parti de Dominique Anglade.
«Le PLQ a des éléments qui touchent au développement économique et régional, des éléments qui me semblent pertinents et utiles sur la pénurie de main-d’oeuvre, sur la charte des régions. Leur grand projet ÉCO est très intéressant et crédible. Et je suis pas mal d’accord avec leur constat sur l’immigration.»
Avec une note de 7,4 sur 10, la Coalition avenir Québec arrive en deuxième place. Selon le professeur Laurin, le parti de François Legault propose un bouclier anti inflation avec d’intéressantes idées.
«Ils parlent beaucoup de lutte contre le décrochage scolaire qui est, pour moi, un axe de développement économique, surtout en pénurie de main-d’oeuvre. Ils ont une vision pour rendre le Québec plus compétitif économiquement. C’est cohérent comme stratégie.»
Le Parti québécois et Québec solidaire suivent avec des notes de 7,2 et de 6,9.
«Le Parti québécois a un programme correct. J’aime qu’ils ne baissent pas les impôts et qu’ils investissent dans les services publics et les infrastructures. Ils promettent de faire des investissements sans générer de dette supplémentaire. J’adore leur stratégie de transition énergétique. Mais il manque plein d’éléments, notamment sur le repreneuriat, sur l’innovation. Québec solidaire, à chaque élection, devient de plus en plus crédible en terme économique. Ils ont de grandes ambitions. Le montage financier est une orgie de dépenses. C’est beaucoup de taxations et de réflexes bureaucratiques pour régler des problèmes économiques. Il y a encore des idées romantiques de gauche souvent inapplicables et pas toujours utiles.»
Le cancre du classement de Frédéric Laurin est le Parti conservateur du Québec. Le professeur en économie lui accorde une note de 4 sur 10, soit deux points sous la note de passage.
«Le Parti conservateur propose des baisses d’impôt qui sont dangereuses et qui vont créer de la dette, car je ne vois pas où ils vont couper. Ils n’ont pas de grande vision économique et ne prennent pas au sérieux la transition énergétique, alors que plus on attend, plus on va le regretter.»
Les détails de cette analyse de Frédéric Laurin sont accessibles au http://fredericlaurin.com/elections-quebec-2022/ ainsi que sur sa page Facebook.
* Plus d'informations concernant les élections sont disponibles au https://www.electionsquebec.qc.ca/.