Flanqué de tous ses députés de la Mauricie et de son ministre de l’Environnement Benoît Charette, le premier ministre François Legault nous donnait déjà l’impression d’être au beau milieu de cette campagne, alors qu'iln'avait pas encore annoncé qu'elle serait déclenchée dimanche. Seule différence: ce n’est pas d’un autobus qu’il est sorti, mais plutôt d’un local du parc portuaire de Trois-Rivières, pour ensuite se diriger vers le bord du fleuve afin d’entretenir les Québécois sur ses engagements en regard de la protection de nos lacs et cours d’eau.
Policiers et gardes du corps postés aux quatre coins, de façon discrète, nous laissaient bien entrevoir que l’on ne prend rien à la légère, sans pour autant donner l’impression d’une crainte pour la sécurité. D’ailleurs, si ça avait été le cas, jamais on n’aurait laissé approcher cette femme et son enfant, venus de Montréal et en visite à Trois-Rivières, qui venaient tout juste d’apprendre que le premier ministre allait se pointer là dans quelques minutes. Visiblement grande partisane de la CAQ, la dame s’est empressée de se mêler aux journalistes, là où elle pouvait le voir et le prendre en photo, en lui faisant de grands signes de la main. «Je l’aime tellement», m’a-t-elle lancé avec enthousiasme.
C’était presque arrangé avec le gars des vues.
Ainsi donc, François Legault a pris, à Trois-Rivières, son cinquième engagement électoral, avant même qu’il ne soit allé rendre visite au lieutenant-gouverneur afin de pouvoir enfin déclencher les élections. C'est maintenant officiel, ce sera déclenché ce dimanche. Avec la tenue d’élections à date fixe, désormais, le suspense est, disons-le, un peu moins intense. Et surtout, pas question pour la CAQ de regarder les autres partis débuter le travail sans y mettre leur grain de sel eux aussi.
«Je ne laisserai pas quatre partis être seuls sur la patinoire», a-t-il déclaré, sourire en coin, avant de spécifier que le déclenchement des élections ne servira qu’à encadrer légalement certaines activités, dont l’affichage et le contrôle des dépenses électorales, mais que d’autres partis politiques ont pris des engagements aussi tôt qu’au printemps dernier. D’ailleurs, durant la même journée de mardi, à la fois Québec solidaire et le Parti libéral y allaient d’engagements électoraux chacun de leur côté.
Pour son passage devant le majestueux fleuve Saint-Laurent, François Legault aura choisi de parler d’environnement, avec l’annonce de la création du Fonds bleu doté d’un budget de 650 M$ pour les quatre prochaines années, et qui sera en partie financé par des redevances aux entreprises qui utilisent l’eau potable au Québec pour leurs activités de production. Avec cet argent, on souhaite venir en aide aux agriculteurs, aux individus qui doivent mettre aux normes leurs installations sanitaires, faire la lutte aux plantes envahissantes, mettre en place un réseau de surveillance des cours d’eau, investir en recherche...
Un montant qui s’ajoute aux 5,6 milliards $ sur dix ans que le gouvernement veut investir auprès des municipalités pour la mise aux normes des infrastructures. Un sujet bouillant à Trois-Rivières, sachant que l’année dernière, plus d’un milliard de litres d’eaux usées étaient rejetées dans ce même fleuve que M. Legault admirait mardi matin.
Seulement pour Trois-Rivières, des investissements de 284 M$ sur les trois prochaines années ont été planifiés au Plan triennal d’immobilisations pour poursuivre cette mise aux normes. Difficile d’imaginer qu’en dix ans, 5,6 milliards $ seront suffisants pour l’ensemble du Québec, non? François Legault a toutefois rappelé qu’avec l’aide d’Ottawa, ce sont en tout 12,6 milliards $ qui y seront consacrés sur une décennie. Le premier ministre entend par ailleurs continuer de serrer la vis aux municipalités qui auraient recours aux déversements. À suivre...
En Mauricie, on se demande pour le moment si on ressent vraiment cette fièvre électorale. À quelques jours du déclenchement, certains partis n’ont même pas encore trouvé tous leurs candidats, soit le Parti libéral et le Parti québécois. Même chose pour le PQ au Centre-du-Québec, qui cherche encore des candidats dans Arthabaska et dans Johnson. Partout, on nous assure que des annonces viendront très bientôt.
Il faut dire que la CAQ jouit actuellement de sondages très favorables, et que rien ne laisse croire, pour le moment, que les députés actuellement en poste dans la région soient sérieusement menacés par les autres partis. D’ailleurs, mardi, c’est un peu le message qu’on laissait filtrer de façon informelle lorsqu’on discutait avec l’entourage mauricien de la CAQ.
À mots couverts, on compte aussi sur la division du vote de l’opposition dans chacune des circonscriptions, ce qui favoriserait déjà les députés sortants, dont deux ont aussi pu jouir d’une importante visibilité de par des fonctions ministérielles, soit Jean Boulet et Sonia LeBel.
Mais ne vous méprenez pas: la CAQ ne tient rien pour acquis dans la région. Et ils ont raison d’agir ainsi, car il serait dangereux de sous-estimer la montée des conservateurs d’Éric Duhaime, qui ont aussi su recruter des candidatures qui sont certainement des atouts dans leur coin de pays et jouissent d’une grande notoriété et d’un bon capital de sympathie.
On n’a qu’à penser à Steve Massicotte dans Champlain, Mario Lyonnais dans Nicolet-Bécancour et Pierre-David Tremblay dans Laviolette–Saint-Maurice. Dans les coulisses de la CAQ, on reconnaît qu’on les surveille tous un peu du coin de l’oeil, qu’il ne faut jamais rien tenir pour acquis.
La campagne, pas encore officiellement lancée, est jeune, et tout le monde a encore tout à gagner... ou à perdre.