Jocelyn Sioui et J. D. Kurtness: pleins feux sur la littérature autochtone

Jocelyn Sioui, à qui l’on doit le livre <em>Mononk Jules</em> et la pièce du même nom, est l’un des auteurs par lesquels les Éditions Hannenorak souhaitent promouvoir la littérature autochtone, avec la collection <em>Solstice</em>.

Ce sont de tout petits livres, mais à grande portée. Jocelyn Sioui et J. D. Kurtness prêtent leur plume à la collection Solstice, des Éditions Hannenorak, plongeant à la fois les lecteurs dans leur univers bien à eux et au coeur d’une littérature autochtone qui gagne à être connue.


Cette collection s’inscrit dans le mouvement En juin : Je lis autochtone ! , lancé par la maison d’édition située à Wendake, qui souhaite ainsi, à sa manière, célébrer le Mois national de l’histoire autochtone.

Le simple fait d’avoir été approché pour ce projet constitue un honneur pour J. D. Kurtness, qui voit en la littérature – et l’art en général – « une manière de créer des ponts entre les cultures ».

« C’est idéal pour entrer en contact avec un imaginaire, avec une histoire, avec des gens, de rendre compte comment l’autre pense, comment il perçoit le monde, comment il le raconte », explique-t-elle au bout du fil, depuis une résidence d’écriture en Allemagne.

Du petit vers le grand

Avec Bienvenue, Alyson, l’auteure originaire de Chicoutimi, née d’une mère québécoise et d’un père ilnu de Mashteuiatsh, propose « une sorte de fin du monde joyeuse, avec beaucoup de fantaisie », utilisant sa région d’enfance comme toile de fond. Le récit d’une quarantaine de pages a pour point de départ Francine Hamel, 54 ans, dont on a mystérieusement perdu la trace à Alma.

L’auteure originaire de Chicoutimi J. D. Kurtness propose « une sorte de fin du monde joyeuse », avec <em>Bienvenue, Alyson</em>.

« Ça commence avec un fait divers très local, proche de Larouche, et on se rend compte que peu à peu, le phénomène prend une ampleur globale. J’ai essayé de partir du très proche, du local, du quotidien des gens, pour voir comment un début d’apocalypse peut se vivre au quotidien, comment ça peut perturber nos habitudes. »

J. D. Kurtness, à qui l’on doit les romans De vengeance (2017) et Aquariums (2019), explique que Bienvenue, Alyson est aussi une forme de questionnement, à savoir si les humains sont vraiment la forme de vie avec qui d’éventuels visiteurs extraterrestres auraient envie d’entrer en contact. Et s’ils étaient davantage portés vers les végétaux ? Ou les animaux ? « Il y a d’autres formes intelligentes de vie que nous sur la Terre. »

Les habitués de sa plume retrouveront une fois de plus son humour noir, un peu décalé, promet l’auteur, qui se réjouit que chaque nouvelle ait ainsi son propre « enrobage », au sein de la collection Solstice, plutôt que de se retrouver dans un recueil.

« Il s’écrit beaucoup de nouvelles au Québec, mais il ne s’en lit pas assez par rapport à la production. Peut-être qu’en le vendant comme un minilivre, les gens vont être moins frileux », dit-elle en riant.

Fierté partagée

Le mot « honneur » vient tout aussi rapidement dans la discussion avec Jocelyn Sioui, qui a accepté de délaisser quelques instants l’écriture scénique pour sauter à pieds joints dans la proposition des Éditions Hannenorak.

« C’est nouveau, la littérature, dans ma vie », lance d’emblée celui qui dit toutefois prendre de plus en plus plaisir à cette nouveauté, au point d’envisager d’en faire une habitude.

Surtout lorsque le prétexte est si beau, comme dans ce cas-ci, avec la collection Solstice, ce genre de projet étant primordial, à ses yeux, pour faire rayonner la littérature autochtone.

Sortir la tête de l’eau

« Sinon, c’est noyé dans tout ce qui se fait. On essaie de sortir un peu la tête de l’eau. L’histoire n’a pas été facile pour les Autochtones et là, il y a beaucoup d’initiatives, beaucoup d’artistes qui naissent, beaucoup de nouveaux auteurs. Je pense que ça vaut la peine de mettre le focus sur eux pour donner la chance à cette littérature-là d’éclore. »

Parce qu’elle est « particulière », « empreinte d’une culture qu’on connaît peu », poursuit-il, se disant lui-même néophyte en la matière. « Je suis un peu comme tout le monde : je découvre qu’il y a des univers fantastiques, incroyables, doux, beaux, difficiles parfois, de la poésie, toutes sortes de choses. »

À l’invitation des Éditions Hannenorak, l’auteur originaire de Montréal et membre de la Nation huronne-wendat a sorti une histoire de ses tiroirs et l’a adaptée pour l’occasion. À travers Frétillant et agile, il « joue » avec le vrai et le faux, traçant un récit qui emprunte un peu à l’histoire, beaucoup à son imaginaire.

Le conte se penche sur la fuite des Wendats en 1649, explique-t-il. Plus précisément sur un groupe de sept fuyards qui sera confronté à des événements aussi mystérieux que dramatiques et au sein duquel se trouve un improbable héros du nom de Auhaïtsic.

« Il est un peu fait à mon image, le personnage. Il n’est pas tellement adroit dans le bois, il marche tout croche, s’enfarge partout, il a un potentiel de désastre. Je m’amuse, il y a de l’humour dans le texte, de l’action, de l’aventure », conclut Jocelyn Sioui, qui est également derrière le livre intitulé Mononk Jules et la pièce du même nom.

Jocelyn Sioui et J. D. Kurtness lanceront leur livre respectif avec des causeries, le 10 juin, à la librairie Un livre à soi de Montréal, puis le lendemain, à la librairie Hannenorak de Wendake.