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Intervenante de première ligne : côtoyer le suicide

Valérie Fortin, intervenante de première ligne.
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Pour plusieurs, parler du suicide vient avec cette étrange impression de nommer l’innommable. Le genre de sujet que l’on aborde du bout des lèvres, en pesant le poids de chaque mot que l’on voudrait aussitôt rattraper. Chaque année, les intervenants du Centre de prévention du suicide 02 (CPS02) prêtent une écoute attentive à 4 300 appelants, afin que la souffrance puisse enfin être nommée… entendue. Parler du suicide sauve des vies.


C’est dans ces moments chargés en émotions que Valérie Fortin, intervenante de première ligne, tend l’oreille. « La prévention du suicide, c’est ma cause de cœur. Ce n’est pas un travail pour moi, c’est ma mission de vie. Par mon cheminement personnel, pour être moi-même endeuillée par le suicide, je comprends la souffrance et je comprends ce que ça cause. Je suis prête à l’accueillir. », raconte-t-elle avec humilité.

Dans ces instants de détresse où la personne est en proie à un profond désarroi, l’intervenante arrive à percevoir le lien qui la rattache à la vie. « Il y a quelque chose d’impulsif dans l’envie de mettre un terme à la souffrance. C’est un court moment où la personne veut arrêter de souffrir, et non de vivre. Et c’est pour ça qu’elle nous appelle. Je suis là pour éclairer ce qui la raccroche à la vie », poursuit Valérie Fortin.

Le contexte dans lequel elle pratique son métier est particulièrement délicat. Être en contact de façon récurrente avec autant de détresse requiert une bonne dose de bienveillance envers autrui, mais encore plus pour soi. « C’est certain qu’il faut prendre soin de sa santé mentale pour ne pas absorber la souffrance des autres. Il faut être disposé à l’accueillir, à l’écouter et s’en détacher. C’est difficile de dire à ses proches ou à quelqu’un qu’on aime qu’on souffre et qu’on pense au suicide. Quand la personne arrive à verbaliser ce qui l’habite, c’est déjà moins lourd à porter. Le calme s’installe et il y a une sorte de libération.»

La mort, peu importe les circonstances dans lesquelles elle survient, à quelque chose de dérangeant. Quand il s’agit d’un suicide, pour ceux qui restent, le malaise prend une dimension différente. Le CPS02 offre du soutien aux personnes endeuillées par le suicide. « Elles ont peur de se confier et de tanner leurs proches. Ce qui reste souvent, c’est l’incompréhension d’un geste qu’elles n’ont pas vu venir. C’est soudain, c’est volontaire. C’est pire que tout. Parler avec une personne avec qui on n’est pas impliqué émotivement, c’est aidant », confie l’intervenante.

Parler du suicide, ça s’apprend

Le Centre de prévention du suicide regroupe une vingtaine d’intervenants disponibles en tout temps pour accompagner les personnes qui songent au suicide, qui sont endeuillées ou qui s’inquiètent pour un proche. « Les gens se sentent souvent impuissants. Ils ne savent pas quoi dire ni quoi faire et viennent parfois à bout de souffle. Nous sommes là pour les outiller. L’important, c’est de parler du suicide. C’est ce qui nous protège, conclut Valérie Fortin, intervenante de première ligne.

Pour consulter les ressources et outils disponibles, ou encore pour communiquer par clavardage CPS02.org

Pour obtenir de l’aide 1-866-APPELLE