Le cas échéant, la tradition voudrait que le transfert de responsabilité vers la Ville s’accompagne des budgets et ressources nécessaires. Si on en venait là, la Ville devra négocier avec le gouvernement du Québec, rappelle le maire Bruno Marchand.
J’ai compris qu’une norme choisie par la Ville devrait cependant être approuvée par le gouvernement.
Confier la gestion des émissions de nickel à la Ville serait sans doute un moyen pour le gouvernement de se sortir du guêpier dans lequel il s’est foutu.
L’idée de multiplier par cinq le seuil des émissions de nickel (14 ng/m³ à 70 ng/m³) ne passe pas au centre-ville de Québec.
En ouvrant la porte à cette discussion, le gouvernement gagnera peut-être assez de temps pour éviter que le sujet s’invite dans la prochaine campagne électorale.
Les relevés du Ministère indiquent que pour les sept premiers mois de 2021 où les données sont disponibles, il n’y en a eu qu’un seul (juillet) où toutes les mesures étaient conformes à la norme de 14 ng/m³.
Pour ceux qui auraient oublié leurs lointaines notions de mathématiques (c’était mon cas) on compte 1 milliard de nanogrammes (ng) dans un gramme.
Le sous-ministre a parlé de dépassements généralement «peu importants», tout en mentionnant deux exceptions en 2020 et 2021.
Les relevés de dépassements transmis par le Ministère au lendemain du point de presse montrent que les dépassements importants n’ont pas été des exceptions.
Sur les 88 dépassements, 28 étaient de 5 fois supérieurs à la norme de 14 ng/m³. Cela veut dire au-delà de la nouvelle norme de 70 ng/m³ qu’envisage le gouvernement. On retrouve aussi dans la liste 15 dépassements supérieurs à 10 fois la norme et 3 au-delà de 20 fois la norme.
Au moment de livrer ce texte, le Ministère de l’Environnement ne m’avait pas encore transmis la liste des sanctions imposées et des entreprises responsables des dépassements à Québec.
L’absence de mesures dans la plupart des régions à risque et le nombre élevé de dépassements à Québec montrent que le Ministère a peiné à faire respecter la norme actuelle sur les émissions de nickel.
Comment croire qu’il pourra faire mieux respecter sa nouvelle norme?
L’objectif avoué du Ministère n’est pas d’améliorer la qualité de l’air au Québec. C’est de faciliter la vie aux entreprises associées au nickel pour les faire mieux paraître aux yeux des investisseurs étrangers.
«Quels sont les coûts, quelles sont les mesures à mettre en place et est-ce que c’est la Ville de Québec qui devrait payer pour ça? Est-ce que le gouvernement devra nous soutenir? C’est des discussions qu’on va avoir», envisage le maire de Québec, Bruno Marchand.
La Ville de Québec en est à «faire le travail» d’évaluer les détails techniques qui s’imposeraient si elle choisissait de se doter d’une norme exclusive sur les émissions de nickel sur son territoire et d’en faire officiellement la demande au gouvernement du Québec.
Lundi, Jacob Martin-Malus, sous-ministre adjoint au développement durable et à la qualité de l’environnement au ministère de l’Environnement et de la Lutte contre les changements climatiques a confirmé que les municipalités sont bel et bien autorisées à réglementer certains éléments reliés à la qualité de l’air sur leur territoire, sous approbation du ministre. Si sa demande est acceptée, une ville devient donc responsable de veiller au respect de la norme, à ses frais.
«D’avoir le contrôle sur une norme, si c’est nous [la Ville de Québec] qui en sommes les responsables, avec aucun budget, c’est problématique. Ça veut dire qu’on prend à notre charge quelque chose qui est présentement à la charge du gouvernement […] Si on exige la norme, il faut exiger aussi les moyens de l’appliquer. Ça ne peut pas être juste la Ville qui en est responsable», a commenté mardi le maire Marchand.
Ce n’est pas juste d’être responsables d’une norme. Si on ne la fait pas respecter, les citoyens ne sont pas mieux servis
Le maire persiste et signe : «il n’y a pas de raison que Québec soit traitée différemment de Montréal», a-t-il répété.
La qualité de l’air dans la basse-ville est une «préoccupation». La Ville analyse donc aussi la possibilité de réclamer au gouvernement provincial qu’il tienne compte de la réalité propre au milieu urbain et aux populations qui y habitent dans l’implantation de la norme sur le nickel.
«On ne peut pas penser qu’on peut évaluer ça de la même façon qu’une mine dans le Nord-du-Québec. Parce que si ça a un effet sur la santé, alors que les populations vivent à proximité, on a un problème. On ne peut pas mettre l’économie au détriment de la santé des populations, c’est inacceptable», plaide M. Marchand.
Déjà, un «travail» est fait pour diminuer les émissions de particules à l’incinérateur, lequel a connu des ratés toxiques récemment, assure le maire. Mais «on n’est pas juste responsables de l’incinérateur, on a aussi une responsabilité envers les citoyens de notre ville, de s’assurer que leur santé est préservée.»
Un comité plénier se tiendra jeudi avec des experts, des groupes citoyens et des entreprises invités à faire le point sur le dossier de la norme du nickel. Le gouvernement du Québec souhaite permettre d’augmenter la concentration quotidienne de nickel dans l’air de 14 ng/m3 à 70 ng/m3.
Par la suite, la Ville de Québec fera connaître sa position.
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