Chronique|

Un Chaos saisissant

Au moment d'offrir ce dernier spectacle avant une longue pause, INVO (Simon Morin) est au bout du rouleau.

CHRONIQUE / J'appréhendais un peu le sujet de Chaos: une explosion lors d'un concert d'une vedette internationale, qui fait plusieurs victimes. Plus tôt cette année, nous avions eu Bête noire et Après, deux séries sur des tueries de masse. Disons que c'est pas ce qu'on appelle la joie.


Néanmoins, je me suis laissé prendre par cette série imaginée par Josélito Michaud, qui commence à TVA le mardi 14 septembre à 21h. Produit chez Amalga (André Dupuy) et Keep it Simple (Josélito), en collaboration avec Québecor Contenu, ce drame psychologique sur fond d'enquête policière parvient à nous happer dès le premier épisode, même si l'entrée en matière peut paraître un peu lente. Disons que la première explosion a de quoi saisir le téléspectateur.

Au terme d'une longue tournée, le chanteur INVO (Simon Morin, dans son premier rôle), l'idole d'un jeune public, offre son 150e spectacle au théâtre Santorini. C'est l'euphorie.

Plus tôt dans la journée, le destin d'Eugénie Normandeau (convaincante Lysandre Ménard), une jeune pianiste prodige, prend une tout autre tournure à un arrêt de bus, alors qu'elle croise Xavier Lanctôt (Pier-Gabriel Lajoie). Le garçon, qui ne la laisse pas indifférente, a en sa possession une passe VIP pour le spectacle du soir, qu'il partage avec neuf autres personnes. Une occasion rêvée pour la jeune fille de sortir de la discipline de chaque instant que lui impose le piano. Sa mère Madeleine (Pascale Bussières), une policière, veut bien lui permettre cette sortie.

Voilà que l'impossible se produit durant le spectacle: une explosion fait huit victimes et une vingtaine de blessés, dont quatre dans un état grave. Qui a commis cet acte horrible, vraisemblablement criminel? Et pourquoi? L'enquête du sergent-détective Pierre Bisson (Pierre Lebeau) permettra de recoller les morceaux, mais il faudra être patient.

Tout au long des 10 épisodes, on retourne à de nombreuses reprises le fameux soir de la tragédie, question de placer une à une chaque pièce du casse-tête. Dans la forme, ça peut rappeler Pour Sarah, où on finissait par tout comprendre au dernier épisode, après s'être bâti mille scénarios.

L'exercice aurait pu s'avérer confus, mais ne l'est pas, du moins dans les deux épisodes que j'ai vus. «Chaque personne cache quelque chose. On voit ce qu'on veut bien voir et on entend ce qu'on veut bien entendre», souligne Josélito, qui signe les textes avec Geneviève Simard, Gabriel Sabourin, Sylvie Bouchard, Pascale Renaud-Hébert et Anita Rowan.

Au moment d'offrir ce dernier spectacle avant une longue pause, INVO est au bout du rouleau. Dans les premiers épisodes, il apparaît comme une star capricieuse, égocentrique, le stéréotype de la vedette internationale inaccessible. Josélito, qui en connaît un chapitre sur le showbiz, affirme que toute célébrité doit trouver l'équilibre entre l'ego et l'humilité.

Dans le rôle du père d'INVO et de son frère Charles (Henri Picard), qui l'accompagne en tournée, Christian Bégin offre une performance poignante et exceptionnelle. «J'te l'ai tellement dit que ton ostie de succès allait démolir toute notre famille», dit-il à son fils après le drame. Cette famille ne s'en remettra peut-être jamais.

En rencontre de presse, Josélito a admis que le tournage de Chaos s'était déroulé par moments dans des «conditions épouvantables». «On a eu peur, on a eu très peur», dit-il.

En pleine pandémie, alors qu'on réduit au minimum le nombre de personnes sur un plateau de télévision, il fallait tourner le spectacle d'une grosse vedette au Rialto, en maintenant les deux mètres de distance réglementaires. Une série comme Chaos nécessitait un nombre d'acteurs 40% plus élevé qu'une série normale. Pour les figurants, c'est 50% plus. On imagine le casse-tête. Heureusement, on a pu tricher et ajouter des spectateurs numériquement.

Comme son sujet, Chaos s'est créée dans l'urgence. En développement depuis plus de deux ans, la série a obtenu le go de TVA plus tôt cette année, et son tournage s'est conclu le 26 juillet dernier pour une diffusion la semaine prochaine. Le dernier texte est parvenu deux semaines avant qu'on le tourne, une chose absolument inhabituelle pour une série de cette envergure.

La réalisation de Stéphan Beaudoin ne semble pas en avoir souffert, même si on devine qu'en temps normal, la foule aurait été beaucoup plus dense dans la salle de spectacle. Le réalisateur d'Alerte Amber et de L'heure bleue parvient à rendre l'ampleur du choc post-traumatique qui habite certains personnages. Les survivants resteront hantés par les images de la déflagration et peut-être même nous aussi, une fois le générique terminé, tellement elles sont saisissantes, quoiqu'un peu répétitives.

Josélito, qui prête sa voix à un animateur de radio dans la série, voulait des vrais musiciens, un vrai chanteur (Simon Morin), une vraie pianiste (Lysandre Ménard) pour mieux traduire la réalité, et il a eu raison. Pour le reste, je laisserai les critiques musicaux juger des chansons collées au répertoire d'INVO, signées Daniel Bélanger et réunies sur un album à paraître le 14 septembre, avec entre autres les voix de Beyries, Mélissa Bédard, qui joue une mère en deuil dans la série, et Lunou Zucchini, qu'on verra à la fin de la série. Même Véronique Béliveau y est, dans une reprise de Revivre de Daniel Bélanger, ce qui a de quoi me réjouir au plus haut point.

Josélito Michaud est clair: il n'y aura pas de suite à Chaos. L'histoire s'arrête au bout du 10e épisode dans une fin qu'on annonce surprenante.

Rappelons que la série a bénéficié des services d'Yves Aucoin, qui travaille avec Céline Dion et avec le Cirque du Soleil, pour la conception visuelle du concert.

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