C’est le contexte pandémique qui permet à l’organisme et à la direction régionale de santé publique d’ouvrir un tel service, réclamé depuis longtemps par le milieu communautaire.
Le site d’injection temporaire de Saguenay détient un permis provincial et se nomme, au sens de la loi, un Centre de prévention des surdoses. Les services offerts sont similaires à un centre d’injection supervisée approuvé par le gouvernement fédéral, mais il ne jouit pas d’un statut permanent.
« La crise des opioïdes n’est pas nouvelle. Ça fait des années qu’on en parle, notamment dans l’Ouest canadien (crise du fentanyl). Les sites supervisés sont des services jugés hautement efficaces pour cette clientèle. La question c’était quand et comment on va le mettre en place et non pas si c’est pertinent. La pandémie nous a simplement donné les moyens de le faire plus rapidement », précise la Dre Catherine Habel, médecin spécialiste en santé publique au CIUSSS Saguenay–Lac-Saint-Jean.
Les sites autorisés par Ottawa sont rares et se trouvent uniquement dans les grands centres comme Montréal. Québec a vu son premier centre ouvrir il y a environ un an.
Le Service de travail de rue de Chicoutimi souhaite rendre son site permanent, car même si la pandémie a accentué les problèmes, l’enjeu est là pour rester. En 2020, 15 décès par surdose sont survenus dans la région, ce qui représente un record.
« Pendant les premiers mois d’opérations, nous pourrons documenter les besoins réels et ainsi déposer une demande au gouvernement fédéral pour pérenniser le service. Pour l’instant, toutefois, nous sommes en mesure d’offrir un site temporaire, un lieu sécuritaire pour prévenir les surdoses », indique Janick Meunier, du Service de travail de rue. Cette dernière rappelle également qu’un site d’injection supervisée sert aussi à assurer la sécurité de toute la population. Car dans les sites à ciel ouvert, il est fréquent de retrouver des seringues souillées au sol, augmentant ainsi les risques de contamination. En plus, un encadrement dans l’injection permet d’éviter les surdoses et les transmissions de maladies, ce qui permet du même souffle d’alléger le système de santé. « On parle d’un investissement qui peut rapporter et être bénéfique pour notre région », pointe Dr Donald Aubin, directeur régional de la Santé publique.
Pour les opérations du site, le CIUSSS investit environ 90 000 $. Il s’agit principalement de prêts de ressources humaines, dont des infirmières.
L’an dernier, les intervenants du Service de travail de rue de Chicoutimi ont distribué 95 000 seringues, un record, selon leurs chiffres.
« Les problèmes liés à la consommation, c’est devenu plus criant avec la pandémie. On a vécu de l’isolement social, l’anxiété s’est accrue, les gens ont changé de rôle, il y a beaucoup d’incertitudes. Tout ça fait en sorte qu’il y a un changement dans la consommation. C’est pourquoi dans ces circonstances, on est en mesure d’obtenir un permis temporaire pour ouvrir un tel site. Mais les enjeux, on le sait, ne disparaîtront pas une fois que l’état urgence est levé », ajoute le Dr Aubin, estimant nécessaire l’obtention d’un permis fédéral pour pérenniser le site d’injection supervisé.