Nouvel appareil pour la dépression à l’hôpital de Chicoutimi: une lueur d’espoir

Le Dr Laurent Coulloudon, psychiatre et chef du Département de psychiatrie du CIUSSS de la région, et Martin Gagnon, directeur général de la Fondation de ma vie.

Les personnes souffrant de dépression majeure et qui ne répondent pas aux traitements traditionnels pourront avoir une lueur d’espoir grâce à un nouvel appareil que compte acheter l’hôpital de Chicoutimi.


Cet appareil, un stimulateur magnétique transcrânien, est au cœur de la nouvelle campagne de financement de la Fondation de ma vie lancée dans les dernières semaines pour l’hôpital de Chicoutimi. Il s’agira du premier appareil de ce genre au Saguenay-Lac-Saint-Jean, alors que cet équipement est plutôt présent dans les grands centres hospitaliers universitaires de la province.

Des traitements de quelques minutes par jour, qui sont sans douleur et non invasifs, sont efficaces, selon les études pour traiter les patients souffrant d’une dépression majeure réfractaire, soit qui ne répondent pas aux traitements d’antidépresseurs, explique le psychiatre Laurent Coulloudon.



« C’est vraiment intéressant, parce que c’est comme une machine de résonance magnétique, mais adaptée pour donner un traitement spécifique à la santé mentale », souligne le Dr Coulloudon, qui est également chef du Département de psychiatrie du Centre intégré universitaire de santé et de services sociaux (CIUSSS) de la région.

L’appareil permet d’envoyer, à l’aide d’un stimulateur, une onde magnétique vers une aire spécifique du cerveau qui est responsable de la dépression majeure.

Le patient demeure éveillé pendant le traitement, est assis et porte des bouchons en raison du bruit associé à la résonance magnétique. Les ondes sont envoyées à l’aide d’une sorte « d’aimant » collé sur la tête, explique le Dr Coulloudon, en entrevue avec Le Progrès.

Des fourmillements ou de petits tapotements peuvent être ressentis pendant le traitement. Des maux de tête sont les principaux effets secondaires de la stimulation magnétique transcrânienne.



Des traitements de trois minutes

Bien que l’utilisation d’un tel appareil pour traiter les problèmes de santé mentale puisse sembler futuriste, cet équipement n’est toutefois pas nouveau.

Il existe depuis plus d’une quinzaine d’années, mais la technologie demeurait coûteuse et les traitements étaient plus longs. L’appareil coûte aujourd’hui environ 85 000 $, contrairement à environ 350 000 $ auparavant.

« Les patients, historiquement, quand on faisait la stimulation magnétique transcrânienne, ça prenait à peu près 30 à 60 minutes de traitement, indique le Dr Coulloudon, qui a eu ses premiers contacts avec ce type d’équipement lors de sa résidence en médecine. Et maintenant, avec la machine qu’on essaie d’acheter, ça prend trois minutes de traitement environ. »

Selon les cas, les traitements s’étalent sur quatre à six semaines, à raison de trois minutes par jour, cinq jours par semaine.

Une souffrance accentuée par la pandémie

La stimulation magnétique transcrânienne s’adressera en premier lieu aux patients suivis depuis des semaines, des mois ou encore des années, et pour qui plusieurs médicaments se sont avérés inefficaces ou causaient des effets secondaires importants.

Le Dr Laurent Coulloudon est fréquemment confronté à des cas de dépression majeure réfractaire dans sa pratique. « C’est des patients qui sont très souffrants, expose-t-il. Ils sont très handicapés par la maladie aussi, c’est des gens qui sont longtemps malades sur plusieurs mois, voire plusieurs années. »



Toutes les sphères de la vie des personnes souffrant de cette maladie se retrouvent affectées, alors que la dépression majeure réfractaire est souvent synonyme d’arrêt de travail prolongé, d’incapacité à conserver un emploi ou encore de difficulté à profiter de la vie et des moments en famille.

Cette souffrance est décuplée en raison de l’effritement du réseau de soutien et de l’isolement causé par la pandémie de COVID-19, constate le médecin spécialiste, dont les patients « souffrent beaucoup de la pandémie ».

Prévenir les hospitalisations

Sans avoir de données régionales en main, le Dr Coulloudon rappelle que de 10 à 15 % de la population en général souffrira d’une dépression majeure dans sa vie, et qu’un certain pourcentage des patients ne répondent pas aux traitements.

Parmi cette population, qui est « très souffrante », certains en viennent au suicide, alors que d’autres seront hospitalisés. « On veut vraiment offrir tous les services disponibles, tous les traitements possibles pour ces patients-là, pour prévenir le suicide, prévenir les hospitalisations », insiste le médecin spécialiste.

Le recours à la stimulation magnétique transcrânienne sera aussi une alternative à la sismothérapie, un traitement par impulsion électrique. Ce traitement est efficace, précise le médecin, mais demeure invasif et demande une anesthésie générale.

Le nouvel équipement contribuera aussi à réduire la pression sur le système hospitalier et les blocs opératoires dans le contexte de la pandémie.

Le Dr Coulloudon espère en outre que l’ajout de cet appareil, qui peut également être utilisé en recherche, rendra la région plus attractive pour le recrutement de psychiatres, la région étant toujours en manque d’effectifs.

Un second appareil à Alma

Le stimulateur magnétique transcrânien pourrait être acheté prochainement par l’hôpital de Chicoutimi, alors que la Fondation de ma vie remboursera ensuite l’achat, précise de son côté Martin Gagnon, directeur général de la fondation.



La campagne de financement de la Fondation de ma vie vise cette année l’achat d’un stimulateur magnétique transcrânien pour l’hôpital de Chicoutimi, un appareil qui permettra d’offrir des traitements sans douleur et non invasifs aux personnes souffrant d’une dépression majeure et qui ne répondent pas aux traitements habituels.

Le chef du Département de psychiatrie du CIUSSS espère pour sa part qu’un second appareil pourra ensuite être implanté à l’hôpital d’Alma, afin de desservir plus facilement la population du Lac-Saint-Jean.

Si vous vivez du stress, de l’anxiété ou de la déprime et que vous avez besoin d’aide, appelez au 811 pour obtenir de l’aide 24h sur 24, 7 jours sur 7.

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CAMPAGNE DE LA FONDATION DE MA VIE: OBJECTIF DE 300 000 $

La Fondation de ma vie s’est fixé un objectif de 300 000 $ pour sa campagne annuelle, espérant ainsi dépasser les sommes records amassées l’an dernier.

Les fonds récoltés permettront de financer l’achat du stimulateur magnétique transcrânien, dont les coûts, en incluant les accessoires, sont estimés entre 85 000 et 95 000 $. Le projet a été identifié de pair avec le comité de priorisation du CIUSSS, au sein duquel la fondation siège.

« C’était l’équipement qui était priorisé au niveau de la psychiatrie cette année, pour tout ce qui touchait le planning, alors ça devenait presque naturel de dire : “C’est nous, la fondation, qui allons l’acheter” », souligne le directeur général de la fondation, Martin Gagnon, en entrevue.

Le soutien aux services en santé mentale sera aussi bénéfique à long terme, face aux impacts de la pandémie. « Je pense que c’est un domaine dont on va parler beaucoup, beaucoup, dans l’après-pandémie, parce qu’il y aura, je pense, des dommages collatéraux », ajoute M. Gagnon.

Ce choix s’inscrit aussi dans la même lignée que l’engagement pris en 2019 avec Bell cause pour la cause d’investir 300 000 $ sur quelques années dans la rénovation des unités de psychiatrie régionales et l’achat d’équipements.

Les sommes supplémentaires amassées durant la campagne 2021 seront consacrées aux autres activités soutenues annuellement par la fondation, qui se dédie aux projets permettant d’améliorer les soins offerts à l’hôpital de Chicoutimi et dans son réseau.

Une campagne 2020 record

Martin Gagnon est confiant que la générosité de la population sera encore une fois au rendez-vous cette année, après une campagne 2020 qui a été au-delà des attentes.

Les besoins criants du système de santé pendant la pandémie et l’appui aux équipes soignantes ont suscité une vague de solidarité qui a permis d’amasser 293 000 $ lors de la dernière campagne de financement, un record. Les sommes ont été principalement amassées grâce à des envois postaux et des appels téléphoniques.

En plus de l’achat d’équipements et le soutien de projets, la fondation a posé également des gestes pour aider directement les patients, en achetant par exemple des couvertures pour des résidents de CHSLD ou encore en payant la télévision aux patients à l’hôpital, depuis le début de la pandémie.

Les dons à la nouvelle campagne peuvent être faits en ligne ou par téléphone au 418 541-1005.

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LA PSYCHIATRIE EN CHIFFRES

1792:  Nombre de personnes hospitalisées en psychiatrie au Saguenay-Lac-Saint-Jean en 2020

5:  Nombre d’unités de psychiatrie dans la région, pour les hôpitaux de Chicoutimi, d’Alma et de Roberval

57 %:  Des participants à une récente étude de Statistique Canada estimaient que leur santé mentale était moins bonne qu’avant le début de la pandémie

Source: Fondation de ma vie