Créer sa propre aventure dans sa cour arrière [PHOTOS] 

Les paysages de la Matawinie.

Alors que la pandémie a forcé la fermeture des frontières, les aventuriers québécois ont réorganisé leurs projets en misant sur les destinations locales pour satisfaire leur soif de découverte et d’adrénaline. Avec un terrain de jeu aussi grand que le Québec, ce ne sont pas les options qui manquent. Le Quotidien vous présente le parcours de quelques amateurs de plein air qui ont réalisé des aventures grandioses dans leur cour arrière (ou presque).


En décembre 2019, Émilie Pellerin a profité de son séjour en Australie pour apprendre à faire du kitesurf. Puis, en mars, la pandémie a forcé la jeune nomade, qui a aujourd’hui 26 ans, à revenir au pays.

Après avoir attrapé la fièvre du vent, elle parcourt le Québec, faisant près de 10 000 kilomètres au cours de l’été pour parfaire sa maîtrise du kitesurf. « Je suis devenue une chasseuse de vent », dit-elle.

À l’automne, elle est embauchée comme professeure dans une école virtuelle, ce qui lui permet de choisir où elle souhaite se poser pour travailler. « J’ai décidé de venir au Saguenay-Lac-Saint-Jean, au moins pour une année, pour venir profiter du vent et des beaux spots pour faire du kiteski », ajoute la native de Sherbrooke.



Dès le mois de janvier, elle se lance le défi de traverser le lac Saint-Jean. Elle fait ses recherches et demande des informations aux adeptes du secteur pour parfaire son plan. Au passage, elle recrute un ami, aussi néophyte du kiteski, pour réaliser cette aventure.

À la mi-janvier, les conditions sont réunies pour tenter de traverser le lac du nord au sud, avec un vent arrière. Le lac est couvert d’une épaisse poudreuse qui, même si elle ralentit l’avancée, est très agréable à surfer.

« On est tombés sur une journée parfaite », remarque Émilie, avant d’ajouter qu’il faisait -25 °C. Ce n’est pas la température extérieure qui allait les ralentir, car de bons vêtements allaient faire le travail.

Le duo part de la pointe de Saint-Méthode, à Saint-Félicien, avec pour objectif de se rendre à Métabetchouan. Après une heure sur les glaces, ils se mettent à douter, car ils n’ont parcouru qu’un sixième du parcours. « On ne s’est pas découragés et on a trouvé notre rythme », soutient Émilie. Le défi a été de taille, mais cinq heures après le départ, les adeptes du vent rejoignent leur destination, après avoir franchi 68 kilomètres.



« La pandémie nous oblige à découvrir les régions du Québec, dit-elle. L’été dernier, c’était la première fois que je venais au Saguenay-Lac-Saint-Jean, et aujourd’hui, je me dis que ça pourrait être un bon endroit pour m’y établir si je finis par me poser les pieds », remarque la nomade, qui a hâte de repartir en voyage.

Les paysages de la Matawinie.

Expédition de 10 jours en Matawinie

Hélène Dumais est une coureuse d’ultramarathon qui fait des courses folles aux quatre coins du monde. Annie-Claude Roberge est une photographe et vidéaste qui parcourt le globe pour filmer des aventures à couper le souffle. Dès qu’elles se sont rencontrées, l’été dernier, grâce à un ami aventurier, Frédéric Dion, les deux femmes dans la quarantaine ont tout de suite connecté.

Faute de pouvoir voyager, Annie-Claude a proposé à Hélène de partir à l’aventure dans sa région natale, Lanaudière, au début de l’hiver, pour faire une randonnée d’une centaine de kilomètres sur 10 jours sur le Sentier national en Matawinie, de la forêt Ouareau au Parc régional des Sept-Chutes.

Annie-Claude en ski, Hélène en raquettes, les deux femmes sont parties à l’aventure, allant de refuge en refuge pour découvrir le territoire.

« La pandémie nous a permis de nous rencontrer et de connecter grâce à la nature », soutient Hélène Dumais.

« Ça m’a permis en de reprendre contact avec mes racines, ma région natale, le territoire où j’ai grandi, celui qui a donné naissance à mon essence, mon amour pour la nature et tout ce qui l’habite », remarque pour sa part Annie-Claude, qui planifiait une traversée de la Mongolie en vélo lorsque la pandémie a mis la planète sur pause.



Pour les deux femmes, cette aventure était aussi une façon de voyager autrement, plus lentement, loin des horaires imposés par un tournage ou une course. Au fil des kilomètres, elles ont pris le temps de vivre pleinement, s’arrêtant pour profiter des paysages et prendre de nombreux clichés en souvenir.

« J’ai tendance à rechercher des destinations spéciales, avec des gros volcans par exemple, souligne Hélène Dumais. Je n’aurais jamais pensé organiser une aventure dans Lanaudière, mais j’ai découvert un bijou qui me pendait sous le nez et je pense maintenant y retourner, dès cet été, pour venir courir », ajoute l’ultramarathonienne.

« Cette aventure n’a pas été une question de distance à parcourir, de défis gigantesques à surmonter, mais plutôt une multitude de rencontres, simples et sans prétention, avec soi, avec l’autre, avec cette nature en nous, tout autour de nous », ajoute pour sa part Annie-Claude Roberge.

Des défis pour tous

Partout au Québec, les amateurs de plein air ont relevé des défis de proximité. Des amis sont allés faire du camping d’hiver sur la ZEC de la Lyonne. Dans le cadre du Double défi des deux Mario, un autre ami s’est lancé le défi de gravir 1600 mètres de dénivelé en une seule journée. D’autres ont fait la course de 32 kilomètres, ou une distance qui leur convenait, à même les pistes de la pointe Saint-Méthode, à Saint-Félicien, dans le cadre des courses CRYO.

Le Défi Everest, lancé en 2013, a aussi été revu en cette période de pandémie. « J’ai lancé ce défi en l’honneur de mon frère qui s’est suicidé, il y a 11 ans », explique Yvan L’Heureux, un acupuncteur adepte de courses d’endurance.

L’idée de base était de grimper l’équivalent de la hauteur de l’Everest, 8848 mètres, en groupe en une seule journée. Dès la première année, l’événement a permis d’amasser 58 000 dollars seulement à Rivière-du-Loup. Les années suivantes, des Défis Everest ont émergé à plusieurs endroits, si bien que l’organisme a amassé 1,4 million de dollars en huit ans, qui ont été remis à 400 organismes de bienfaisance.

En mode pandémie, l’événement à date fixe n’était plus possible et l’organisation a revu son offre en mode virtuel, amassant tout de même 300 000 dollars en 2020. En 2021, les organisateurs ont poussé la réflexion plus loin, en ajoutant les Camps de l’Everest à son offre. Le plan de match : réaliser huit fois l’équivalent de l’ascension de l’Everest en huit mois. L’équivalent de 70 784 mètres de dénivelé. Jusqu’à présent, 300 personnes ont embarqué dans l’aventure.

« C’est un défi d’élévation où il n’y a pas de compétition, explique Yvan L’Heureux. Les gens peuvent le faire à la course, en ski ou en raquettes, et ils choisissent leur propre terrain de jeu en y allant à leur rythme. Chacun crée sa propre aventure. »



Pour permettre à plus de gens de participer, l’organisation a aussi ajouté le défi Camp de base, qu’il est possible d’atteindre en parcourant une seule ascension de l’Everest.

En Kavale

Question de créer sa propre aventure, l’adepte de courses allant jusqu’à 900 km ( !) s’est trouvé un partenaire d’ultramarathon, Richard Turgeon, pour traverser le Québec à la course et en vélo, sur une distance de 1300 km pendant 10 jours, cet été.

Dans le cadre de ce défi, appelé Kavale, les deux hommes alterneront, un à la course et l’autre à vélo. Celui sur deux roues sera responsable des ravitaillements, des repas et du campement. « On ne doit pas se barrer les pattes à cause de la pandémie », dit-il.

En plus des objectifs personnels, ce défi sera un prétexte pour amasser des fonds pour le Regroupement des Maisons des Jeunes du Québec (RMJQ). Comme quoi la pandémie peut aussi créer de belles opportunités !