Les événements remontent à presque trois ans. Le 29 janvier 2017, Louise Bouchard est arrêtée en état d’ébriété au volant de sa voiture par des patrouilleurs de Saguenay. Voyant qu’elle présente des symptômes de facultés affaiblies, les policiers la soumettent à l’ivressomètre, qu’elle échoue. Elle souffle alors des taux de ,141 et ,134.
Les policiers la mettent en état d’arrestation et l’amène au poste. Ils lui disent que si personne ne peut venir la chercher, elle sera écrouée. Louise Bouchard répond qu’elle ne peut pas appeler son conjoint, puisqu’il n’est pas en mesure de conduire, et qu’elle ne veut pas déranger ses proches. Elle est donc mise en cellule à 3 h 50 du matin. Louise Bouchard sera libérée cinq heures plus tard, à 8 h 50. Durant cette période, personne n’est allé la voir.
L’avocat de la quinquagénaire, Me Charles Cantin, avait déposé une requête en arrêt des procédures, puisqu’il affirmait que sa cliente avait été détenue illégalement. Cette requête avait été débattue en juillet dernier. Selon le criminaliste, qui évoquait la Charte des droits et libertés, sa cliente avait tout simplement été oubliée en cellules par les policiers.
L’accusée avait expliqué en cour s’être sentie « comme un animal, comme un chien en cage ».
Les policiers impliqués avaient témoigné de leur côté qu’ils avaient gardé Mme Bouchard en cellule pour sa sécurité, puisqu’elle pleurait beaucoup et que personne ne pouvait venir la chercher au poste. Ils avaient évoqué le motif de la « protection en boisson ».
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Le tribunal juge qu’elle a été détenue illégalement et de façon arbitraire. Il y a eu violation de ses droits.
En guise de réparation, Me Charles Cantin demandait l’abandon des procédures, soit le retrait du chef d’accusation de conduite avec les facultés affaiblies de sa cliente.
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Le juge Pierre Simard, de la Cour du Québec, avait pris la question en délibéré et il a finalement rendu sa décision lundi matin.
Le juge devait notamment trancher s’il y avait eu violation des droits constitutionnels de l’accusée et si une détention de cinq heures était nécessaire dans son cas.
Il a répété que la femme n’avait pas résisté à son arrestation et qu’elle avait collaboré lors de l’ivressomètre, mais qu’elle s’était mise à pleurer lorsqu’on l’avait mise en cellule.
Il a également précisé que l’accusée avait subi une fouille complète et qu’on ne lui avait pas proposé d’appeler un taxi pour rentrer chez elle. Il a convenu que cet événement avait dû être une mauvaise expérience pour la dame, d’autant plus qu’elle n’a pas d’antécédents judiciaires et qu’elle n’avait jamais été détenue. Il a ajouté qu’aucun suivi n’avait été fait auprès d’elle durant sa détention.
« Le tribunal juge qu’elle a été détenue illégalement et de façon arbitraire. Il y a eu violation de ses droits », a déclaré le juge Simard, ajoutant que priver un citoyen de sa liberté sans motifs valables est grave.
« Maintenant, la réparation ? », s’est questionné le juge Pierre Simard. En examinant le dossier, le magistrat a conclu que la seule façon de réparer cette injustice était l’abandon des charges, puisque l’accusée ne faisait face qu’à un seul chef d’accusation et qu’une accusation réduite n’aurait donc pas pu réparer le préjudice. Le retrait des procédures était donc la seule option possible pour préserver l’intégrité du système de justice, a affirmé le juge Simard.
Louise Bouchard, qui était présente en cour lundi, n’a pas immédiatement compris ce qui se passait, jusqu’à ce que son avocat lui dise que « c’était bien fini ».
Le criminaliste s’est évidemment montré satisfait du jugement, estimant qu’il s’agissait là d’une décision importante.
Questionné à savoir si Louise Bouchard compte intenter des poursuites contre le Service de police de Saguenay, Me Charles Cantin a affirmé qu’il s’agissait d’une possibilité.