Le juge Jean Hudon, de la Cour du Québec, a rendu une décision, mercredi matin, au Palais de justice de Chicoutimi.
Le magistrat a lu son jugement de 19 pages en expliquant de quelle façon il avait retenu les témoignages entendus devant lui.
Le tribunal a cru la version de la plaignante qui a dit à trois reprises ne pas vouloir d’une relation sexuelle avec Roy-Lagacé, mais que celui-ci n’a pas tenu compte de l’absence de consentement de la victime et qu’il est allé au bout de ses intentions.
Le juge retient aussi que l’accusé a commis une voie de fait armée lorsqu’il a lancé une boîte de condoms en aluminium en direction de la victime. Même si l’objet n’a pas atteint la femme, le tribunal note qu’il s’agit de voies de fait armées.
Mais les victimes n’ont pas été crues lorsqu’elles ont prétendu avoir été suivies ou que Roy-Lagacé était passé devant leur résidence avec des intentions spécifiques.
« La preuve qu’il y a eu une activité sexuelle malgré trois refus de la victime, la passivité de celle-ci et ses pleurs lors de l’acte et la demande que lui a fait M. Roy-Lagacé de ne pas pleurer démontrent tant sa connaissance de l’absence de consentement que son insouciance et aveuglement à cet égard », écrit le magistrat sur l’accusation d’agression sexuelle.
Il reconnaît l’accusé coupable étant donné que le ministère public a prouvé hors de tout doute raisonnable la commission de l’infraction.
Concernant les voies de fait armées d’une boîte de condoms, le juge Hudon retient que même l’accusé reconnaît avoir lancé la boîte « vers elle, très vers elle » et que même s’il ne l’a pas atteint, le fait de l’avoir lancé en sa direction constitue des voies de fait armées.
Roy-Lagacé a aussi été reconnu coupable d’un mauvais entreposage d’une arme à feu et d’un chargeur.
Acquittements
L’ex-militaire de Bagotville avait été acquitté de quatre chefs d’accusation sur une troisième victime. Celle-ci a quitté le tribunal au beau milieu de son témoignage et n’est pas revenue par la suite.
Roy-Lagacé faisait donc face à huit autres chefs d’accusation. Coupable de trois, il a été acquitté de cinq chefs de voies de fait, de harcèlement criminel, d’introduction par effraction (2) et d’entrave au cours de la justice.
Dans sa décision, le juge Hudon a noté que la notion de complot contre l’accusé ne tenait pas la route, même si les trois plaignantes se sont vues et rencontrées avant le dépôt des plaintes.
Il ne retient pas non plus le harcèlement criminel parce que l’accusé est passé devant la résidence d’une victime.
Au sujet des voies de fait, le tribunal estime que l’accusé était en droit d’expulser une des plaignantes qui était entrée chez lui par effraction. Même chose pour l’entrave. Le fardeau de la preuve hors de tout doute raisonnable n’a pas été rempli, surtout que l’accusé voulait s’informer de l’état de santé d’un enfant. Et le juge rejette aussi l’accusation d’introduction par effraction de Roy-Lagacé, qui était entré chez son ex après avoir entendu un enfant pleurer.
La méthode utilisée d’enfoncer la porte n’était pas appropriée, mais dans les circonstances, il n’y a pas eu d’infraction criminelle.
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L'ACCUSÉ DEMANDE D'ALLER EN APPEL
Quelques heures après avoir appris qu’il était reconnu coupable d’agression sexuelle sur une ex-conjointe, Jason Roy-Lagacé a donné le mandat à son avocat de porter les trois verdicts de culpabilité en appel. À la Couronne, la procureure analyse aussi la possibilité de faire de même.
Roy-Lagacé a été trouvé coupable d’agression sexuelle sur une ex-conjointe et de voies de fait armées sur une autre. Le Code criminel canadien prévoit une peine maximale de 10 années de pénitencier pour une infraction d’agression sexuelle.
Dans les minutes qui ont suivi les verdicts, Me Charles Cantin, en défense, avait laissé voir qu’il songerait à un appel. Mais peu après, son client lui a donné le mandat.
« Les voies de fait armées ne sont pas un événement majeur. C’était presque un fait divers à travers toute la trame amenée par les témoins. Le chef le plus important, c’est celui de l’agression sexuelle. Nous allons aller en appel de la décision », de dire Me Cantin.
« J’ai quelques interrogations dès maintenant, mais je vais réserver mes commentaires pour la suite étant donné que nous sommes toujours en procédure judiciaire. Il faut parfois prendre un peu de recul », poursuit Me Cantin.
Ce dernier s’est réjoui, par contre, des nombreux acquittements prononcés en faveur de son client.
Le criminaliste ne croit pas que l’attitude de l’accusé au tribunal ait pu lui nuire dans l’analyse du juge. Me Cantin précise que le magistrat l’a cru sur plusieurs chefs d’accusation.
Mitigé
Du côté de la Couronne, Me Inkel prendra le temps nécessaire pour lire et bien comprendre la décision du tribunal.
« Je veux évaluer si la décision est appelable sur ces chefs. Je ne suis pas en mesure de le dire pour le moment. Pour la peine, je n’ai pas regardé le quantum, car il n’existe pas beaucoup de jugements pour des agressions sexuelles dans un couple. Je ferai une recherche, mais la peine devra avoir une certaine sévérité, pour refléter la gravité des gestes. »
« D’une certaine façon, le jugement est mitigé, car il y a certains chefs qui ont été retenus, comme l’agression sexuelle et les voies de fait armées. On va prendre connaissance du jugement. Un dossier comme celui-ci n’est jamais simple, car ce sont des gestes commis dans le cadre d’une relation de couple. Il est difficile d’en tirer une inférence », ajoute Me Inkel.
Les représentations sur la peine sont prévues le 18 février.