Le supplice qu’ont vécu les 58 coureurs du Marathon partagé de Saguenay doit ressembler à celui que je vis en essayant d’écrire cette chronique.
Eux, ils m’ont poussé, assis bien confortablement dans un fauteuil adapté Kartus, dans la côte de Saint-Jean-Eudes et dans les montées du rang du Fromage (Saint-Martin).
Moi, je dois leur rendre à l’écrit chaque goutte de sueur et toute la générosité dont ils ont fait preuve, me propulsant, dans la joie comme dans la douleur, sur 42,2 kilomètres, de La Baie à Jonquière. Un don de soi qui n’a pas de prix.
Samedi, j’étais l’une des huit personnes à mobilité réduite qui ont pu accomplir l’impensable : un marathon. Nous avions chacun huit coureurs avec nous, deux par relais d’une dizaine de kilomètres. Un des organisateurs a même qualifié les coureurs d’« accessoires » pour les cocoureurs.
Et à l’arrivée, c’est moi qui ai reçu une médaille ; pas eux. Et pourtant !
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Équipe Beaumont
Eux, dans mon cas, ce sont les membres de l’équipe François Beaumont - une inspiration et le regretté ami proche de plusieurs de mes connaissances ; quel hasard et quel signe du destin !
Eux, c’est Mario Morissette, Julien Levesque, Benoit Levesque, Marie-Hélène Gilbert, Romane Le Gallou, Yan Lapierre, Marie-Ève Brassard et Anne-Sophie Potvin.
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Cette médaille, c’est surtout la vôtre. Et je ne dis pas ça uniquement par culpabilité pour l’effort déployé ; je le dis par reconnaissance ! Merci d’avoir tout donné pour moi !
Mario a bien résumé la chose : « Grâce à toi, j’ai dépassé mes limites.
– Grâce ou à cause, ai-je rétorqué.
– Grâce, a-t-il insisté. »
Mario a même fini la gueule en sang tellement il a tout donné !
Julien Levesque, lui, a fait pratiquement la distance au complet et avant chaque montée, il apparaissait pour donner un coup de pouce aux deux coureurs du relais en cours. Parfois, ils devaient se mettre à trois pour me livrer au haut de la nouvelle montagne. C’était « la Machine ».
Benoit, lui, « le plus vieux du peloton », m’a fourni l’explication du caractère surhumain de son fils... Julien ! Le père, comme le garçon, a livré une performance impressionnante.
Marie-Hélène, elle, je pense qu’elle s’est surprise elle-même. Avec son grand sourire, elle a répété à maintes reprises : « Laisse-le-moi ! » Elle a même rembarqué dans le peloton pour la quatrième étape.
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Romane, elle, était l’une des quatre organisateurs, avec Dave McMullen, Donald Dubois et Marie-Ève Larouche. Une équipe de feu qui a livré une première édition flirtant avec une note parfaite. Une performance à la hauteur de celle de ma coureuse presque trop rapide !
Yan, lui, a dû renoncer à son défi personnel de ne pas avoir besoin de Julien en back-up. Et tant mieux, puisqu’il a peut-être ainsi réservé l’énergie nécessaire pour un petit sprint dans les derniers mètres, nous permettant de rallier la ligne d’arrivée en premiers !
Cela dit, ce n’était pas une course ; c’était un « travail d’équipe », a dit Gilles Plourde, celui avec qui j’avais réalisé ma première course partagée, en avril, à Kénogami ! Ces sages paroles, il les a prononcées alors qu’il venait prêter main-forte à mon équipe ; lui étant attitré à un autre cocoureur.
Revenons à mon équipe.
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Marie-Ève, elle, a dit à Julien – pas moi, l’autre – que c’était « son idole », se confondant en excuses d’avoir besoin de son aide. Et pourtant, elle a fait sa part et a couru sans problème son 10 kilomètres, ce qui est impressionnant en soi. C’est plus au niveau des bras qu’elle a atteint sa limite, son bébé dans la poussette pesant 200 livres de plus que celui qu’elle a l’habitude de transporter !
Anne-Sophie, elle, a fait une petite sortie de route bien sympathique, laquelle m’a simplement fait sourire. Toi aussi, tu m’as touché par ta générosité et ta joie de vivre ! Une vraie fille d’équipe !
Tous ensemble, vous m’avez permis d’accomplir l’impensable. Vous m’avez fait vivre les émotions qui stimulent tant l’inspiration de cet événement, la multiple marathonienne et détentrice d’un record Guinness de course partagée, Marie-Michelle Fortin. Une ambassadrice pour le fauteuil Kartus, un équipement d’exception conçu à Sherbrooke.
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Grâce à...
Les paroles « À cause, à cause, à cause » de Céline Dion n’avaient pas leur place au Marathon partagé. C’était plutôt « Grâce à, grâce à, grâce à » !
Ainsi, grâce à vous, j’ai vécu par procuration la montagne russe d’émotions de la course longue distance, crispant le visage sans raison dans les côtes quand je vous entendais forcer comme jamais et lâchant une longue expiration une fois au sommet ! Et en écrivant ces lignes, j’ai l’impression de revivre chaque seconde de cette expérience inestimable.
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Grâce à vous, j’ai passé la ligne d’arrivée, le bras en l’air, en souriant à Marie-Michelle, à mes côtés ! Le photographe Rocket Lavoie a capté ce moment magique à l’arrivée, alors que je ne regardais pas la ligne d’arrivée. Non, je regardais ma nouvelle amie, comme pour la remercier d’un sourire d’avoir inspiré un tel événement.
Grâce à vous, nous avons sensibilisé les Saguenéens croisés en chemin aux valeurs d’inclusion et de générosité.
Grâce à vous, nous nous sommes sentis inclus et pas si différents pendant quatre heures et demie.
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Grâce à vous, Patrice Imbeau, Christine Thibeault, Claudia Duchesne, Éli-Jeanne Tremblay, Pierre-Luc Gauthier, Marie-Michelle Fortin et moi avons réalisé l’irréalisable !
Grâce à la vingtaine de bénévoles, aux étudiants en éducation spécialisée et aux organisateurs, nous avons eu une expérience sans « aucune épine », comme l’a souligné Marie-Ève Larouche dans le trajet du retour.
Grâce à dame Nature, nous avons pu profiter pleinement des beaux paysages saguenéens, en plus de sentir un petit vent frais bienvenu.
Grâce à nous, vous avez compris les défis quotidiens de la mobilité réduite, surtout les organisateurs, quand ils ont constaté l’inaccessibilité des toilettes de la Zone portuaire de Chicoutimi, une mauvaise surprise qui a vite été corrigée, mais qui leur est restée en tête. « On ne réalise pas à quel point vous devez vous buter à des incohérences dans votre quotidien », m’a lancé la très sympathique Marie-Ève.
Grâce à nous, vous avez oublié les chronos pour donner « un sens nouveau » à votre course.
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Tous ensemble
Tous ensemble, les quelque 50 coureurs et les huit cocoureurs se sont donné une bonne leçon : la force de la solidarité.
Le but commun était de relever le défi, peu importe comment. Ça s’est fait dans la bonne humeur, sous un soleil radieux, avec des paysages à couper le souffle.
Tous ensemble, nous avons dit « Merci ! » au concepteur des Kartus, Philip Oligny, présent pour assister à cette première.
Tous ensemble, nous avons démontré qu’une course inclusive était possible, puisque l’événement servait de projet pilote pour Les Courses partagées du Québec, un organisme qui aimerait voir des exploits semblables aux quatre coins de la province.
Tous ensemble, nous avons fait naître ce qui pourrait devenir une nouvelle tradition régionale, au Royaume des saines habitudes de vie et de la solidarité.
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À l’an prochain
Le Marathon partagé de Saguenay reviendra l’an prochain, ont promis les organisateurs, qui ont pu remettre, grâce aux partenaires de ce succès, un fauteuil de course adaptée au Centre de réadaptation en déficience physique de l’hôpital de Jonquière.
L’an prochain, j’y serai avec plaisir ! Et vous, les coureurs ?
« Oui ! »
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