Éruption meurtrière au Guatemala: «le volcan nous aura»

Une secouriste transporte le corps d’un enfant après l’éruption spectaculaire du volcan «de Fuego», au Guatemala. Les colonnes de cendres émises par le volcan ont atteint 2200 mètres d’altitude, réduisant à néant routes et villages.

ALOTENANGO, Guatemala — Le décompte macabre pourrait encore s’alourdir mardi au Guatemala avec la poursuite des recherches des nombreux disparus après l’éruption du Volcan de feu, le dernier bilan faisant état de 69 morts après la découverte lundi par les sauveteurs de nombreux corps calcinés.


L’éruption dimanche de ce volcan culminant à 3763 mètres et situé à 35 kilomètres au sud-ouest de la capitale Guatemala, a également entraîné l’évacuation d’urgence de plus de 4500 personnes des villages situés sur le flanc du volcan, qui a projeté de la lave et des cendres sur une vaste zone, semant la panique parmi les habitants.

Selon David de Leon, porte-parole de la Coordination nationale pour la gestion des catastrophes (Conred), le bilan s’élevait lundi soir à 69 victimes. Quelque 46 blessés ont été recensés, dont la moitié sont dans un état grave.

«Il y a des disparus, mais on ne sait pas combien», a déclaré de son côté le directeur de la Conred, Sergio Cabañas. Quelques heures plus tôt, un précédent bilan faisait état de 33 morts.

À San Miguel Los Lotes, hameau détruit par l’éruption, un journaliste de l’AFP a pu observer lundi matin un paysage désolé mêlant décombres de maisonnettes réduites à néant et corps noircis d’hommes et d’animaux domestiques gisant entre boue et cendres encore fumantes.

Eufemia Garcia, 48 ans, doit la vie à son mari qui l’a forcée à quitter sa maison, mais elle était lundi à la recherche de trois de ses fils, de sa mère, de plusieurs frères et de neveux. «Je ne voulais pas partir, je voulais y retourner, et je n’ai rien pu faire pour sauver ma famille», sanglote-t-elle.

Piégés par la lave 

«Si on s’en sort cette fois, une autre éruption nous aura», prédit Efrain Gonzalez, 52 ans, assis par terre dans un abri installé à Escuintlan, non loin de la localité d’El Rodeo, la plus affectée par l’éruption.

Efrain est parvenu à fuir avec sa femme et son bébé d’un an, mais son fils de 10 ans et son autre fille de 4 ans sont portés disparus après que la lave eut emporté leur maison.

Dimanche, des images diffusées à la télévision et sur les réseaux sociaux ont montré une immense nuée de cendres descendant du volcan avant d’engloutir une route tandis que des habitants et des membres des équipes de secours fuyaient en courant. D’autres montraient des personnes couvertes de cendres que des secouristes essayaient de mettre à l’abri.

Le directeur de la Conred a indiqué que les personnes décédées avaient été piégées par la lave incandescente descendue à toute vitesse du volcan.

Au total, l’éruption a duré plus de 16 heures, mais «une réactivation est possible», a prévenu de son côté l’Institut national de vulcanologie, recommandant de maintenir de strictes mesures de précaution dans cette région.

L’éruption dimanche du volcan a entraîné l’évacuation d’urgence de plus de 4500 personnes des villages situés sur le flanc du volcan, qui a projeté de la lave et des cendres sur une vaste zone, semant la panique parmi les habitants.

1,7 million de personnes affectées

«On n’a jamais vu une chose pareille», affirme Aura Concobar, 38 ans, qui est miraculeusement parvenue à fuir El Rodeo avec dix autres membres de sa famille.

Les colonnes de cendres émises par le volcan ont dépassé l’altitude de 2200 mètres au-dessus du cratère, selon l’Institut de volcanologie.

L’éruption a touché notamment des communes rurales proches du volcan et la cité coloniale d’Antigua, le plus important site touristique du Guatemala.

Un total de 1,7 million de personnes sont affectées à divers degrés par la catastrophe, selon la protection civile.

Le président guatémaltèque Jimmy Morales, qui a visité lundi les zones sinistrées, a décrété un deuil national de trois jours.

Un groupe des donateurs (Allemagne, Canada, Espagne, Royaume-Uni, Italie, Suède, Suisse, France, États-Unis, Union européenne, Banque interaméricaine de développement, Banque mondiale, Fonds monétaire international, Organisation des États américains et Nations Unies au Guatemala), a exprimé sa solidarité et son soutien pour surmonter la tragédie.

Le Mexique, le Salvador et le Honduras ont également proposé leur aide.

Le Volcan «de Fuego» était déjà entré en éruption en janvier 2018.

En septembre 2012, son précédent réveil avait entraîné l’évacuation de quelque 10 000 personnes résidant dans des villages situés sur le flanc sud.

Deux autres volcans sont également actifs au Guatemala : le Santiaguito (ouest) et le Pacaya (20 km au sud de la capitale).

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LES ÉRUPTIONS LES PLUS MEURTRIÈRES DEPUIS 25 ANS

Un paysage désolé à San Miguel Los Lotes, un hameau détruit par l’éruption

2014: Japon 

Le volcan Ontake (3067 mètres d’altitude au centre du pays), se réveille le 27 septembre, projetant d’épais nuages de fumée, de cendres et de pierres. Plusieurs centaines de randonneurs se trouvent piégés, dont une soixantaine sont tués.

Cette catastrophe est la pire de ce type dans l’archipel depuis la fin de la guerre. En 1991, l’éruption du mont Unzen avait fait 43 morts, dont les volcanologues français Maurice et Katia Krafft et le chercheur américain Harry Glicken.

2014: Indonésie 

Sur l’île de Sumatra (ouest), au moins 16 personnes meurent début février dans une spectaculaire éruption du volcan Sinabung qui s’était réveillé cinq mois plus tôt après 400 ans de sommeil. En mai 2016, des villages ont été ensevelis par d’épaisses couches de cendres brûlantes après une nouvelle éruption, faisant au moins sept morts.

2010: Indonésie 

L’éruption en octobre du Merapi (près de 2900 mètres d’altitude), fait plus de 300 morts et entraîne le déplacement de 280 000 personnes. C’est la plus forte éruption depuis 1872 de ce volcan situé dans une région très peuplée au centre de l’île de Java, même si l’éruption de 1930 avait été plus meurtrière (1300 morts). En 1994, une autre éruption avait fait 60 morts.

2002: RDCongo 

Le Nyiragongo, sur les hauteurs de Goma (est) à plus de 3000 mètres, entre en éruption mi-janvier, faisant plus d’une centaine de morts, et couvre de lave quasiment toute la partie est de la ville. L’éruption la plus meurtrière avait eu lieu en 1977 avec plus de 600 morts.

1999: Pérou 

À 800 km au nord-est de Lima, une soudaine éruption volcanique provoque en novembre l’explosion d’une colline et des glissements de terrain, 34 disparus.

1997: Montserrat 

En juin, l’éruption de La Soufrière sur l’île britannique de Montserrat (Petites Antilles) fait 20 morts. Plymouth, la capitale qui avait été évacuée, est rayée de la carte.

1996: Philippines 

L’effondrement, en septembre, du cratère du volcan Parker, dans le sud de l’île de Mindanao, fait 70 morts et 30 disparus. Cinq ans auparavant, le réveil du Pinatubo (80 km au nord de Manille) avait tué plus de 800 personnes.

La plus célèbre éruption volcanique de l’histoire est celle du Vésuve, dans le sud de l’actuelle Italie, qui a détruit Pompéi et Herculanum en 79 après JC.

L’explosion du volcan Krakatoa en Indonésie, en 1883 (36 000 morts), est considérée comme la plus importante jamais observée : le jet de cendres et fumée, jusqu’à 20 000 mètres d’altitude, plonge la région dans une nuit totale. L’éruption a provoqué un tsunami dont les vagues ont fait le tour du monde.