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’école à la maison est une réalité méconnue et qui questionne. Pourquoi priver des enfants du système d’éducation formel dont la société québécoise s’est dotée et qui, en dépit de certaines lacunes, demeure de grande qualité ? La question interpelle d’autant que cette option marginale, qui est enchâssée dans la Loi sur l’instruction publique, est en pleine croissance au Québec. De 388 enfants recensés en 2002 par le ministère de l’Éducation, ce nombre est passé à 1032 en 2010. Aujourd’hui, on estime qu’il se situe entre 2000 et 8000. L’imprécision de l’estimation vient du fait que 40 % des parents ne déclareraient pas la situation auprès des autorités scolaires, malgré qu’ils soient tenus de le faire.
Qu’est-ce qui amène des parents à choisir l’école à la maison ? La poignée de recherches québécoises – dont la pionnière est la professeure Christine Brabant de l’Université de Montréal – a permis d’identifier cinq principaux motifs : un désir de se doter d’un projet familial de longue haleine ; une objection au mode d’organisation sociale et pédagogique de l’école ; un potentiel d’enrichissement pour les enfants ; une préoccupation marquée à l’égard du développement social et affectif de l’enfant ; un désir de transmettre des valeurs différentes de celles de l’école. En bref, dans plusieurs cas, on relate que le choix découle d’une expérience négative vécue par les parents alors qu’ils étaient sur les bancs d’école. Les travaux de recherche menés au Canada anglais et aux États-Unis mettent en lumière des motifs semblables.
Des résultats supérieurs à ceux de l’école
Qu’en est-il de la réussite éducative des jeunes qui apprennent à la maison ? Les travaux de recherche sont plutôt consensuels à l’effet que les résultats sont supérieurs à ceux de l’école publique pour les aspects suivants : habiletés sociales ; maturité sociale ; confiance en soi ; habiletés de communication ; interaction en groupe ; leadership ; résultats scolaires, en particulier en mathématiques et en lecture.
Il importe toutefois de mettre ces résultats en perspective à partir de trois éléments. D’abord, au plan méthodologique, il se pourrait que les résultats soient surestimés par le fait que les familles qui réussissent le mieux participent davantage aux recherches que celles qui ont moins de succès.
Ensuite, la grande individualisation de l’apprentissage à la maison procure un avantage indéniable à ce contexte d’éducation, en comparaison à la complexité de la gestion d’une classe de 30 élèves.
Enfin, 75 % des parents qui font l’école à la maison sont détenteurs d’une formation de niveau postsecondaire. Qui plus est, dans près d’une famille sur deux, on retrouve un parent qui possède une formation ou une expérience de travail en éducation. Nombre de parents qui se lancent dans cet ambitieux projet familial ne le font donc pas de façon intuitive.
Bien que l’école à la maison demeure une option marginale, son essor au cours des 15 dernières années au Québec illustre un véritable besoin.
Ce dernier rejoint d’ailleurs des orientations qui sont en croissance eu égard à l’apprentissage en contexte scolaire, c’est-à-dire le décloisonnement des parcours de formation et la personnalisation de l’apprentissage. Ces éléments occupent d’ailleurs une place importante dans le rapport sur la prise en compte de la diversité des élèves que le Conseil supérieur de l’éducation a fait paraître cette semaine.
Pour plus d’information sur l’école à la maison :
Brabant, C (2013). L’école à la maison au Québec : un projet familial, social et démocratique. Québec : Presses de l’Université du Québec. 280 pages.