Roberval-Saguenay pointé du doigt

«Roberval-Saguenay a agi de façon à compromettre la santé du travailleur. La compagnie a failli à sa tâche.»


Ce verdict, prononcé par le directeur santé et sécurité de la CSST, Jean Hébert, ne laisse aucun doute. Robin Turgeon, 51 ans, qui a été happé mortellement par un train alors qu'il déneigeait une voie ferrée à Saint-Bruno, le 29 janvier 2012, aurait pu connaître un autre sort, n'eût été la «méthode de travail improvisée » utilisée par son employeur.

La CSST a dévoilé son rapport d'enquête hier matin devant les médias. Dans ce document de près de 50 pages, l'organisme identifie une combinaison de facteurs qui sont directement responsables de la mort du travailleur.

Le 29 janvier, à 7h, une équipe de Roberval-Saguenay est déléguée pour déneiger la gare de triage de Saint-Bruno. Ces travailleurs sont dits «autonomes», puisqu'aucun contremaître ne détermine de séquence de travail. Alors que Robin Turgeon s'affaire sur l'aiguillage 24S, un train le heurte de plein fouet, le traînant sur 270 m.  L'homme n'a jamais pu voir ou entendre le train: il travaillait dos à la locomotive, de façon à se protéger du vent, et l'outil qu'il utilisait, une lance à jet d'air, était trop bruyant pour qu'il puisse entendre le train. De plus, contrairement à ce qu'exige le Règlement d'exploitation ferroviaire (REF), aucun signaleur n'accompagnait le travailleur de façon à le protéger.

«L'équipe de train ne sait pas qu'il y a un travailleur à ce moment-là (sur la voie ferrée). Elle n'avait pas moyen de le voir ou de savoir puisque l'homme n'avait pas de radio et qu'il n'y avait pas de séquence de travail d'établi ce matin-là», pointe l'inspecteur de la CSST, Rémi Gilbert.

Gestion inefficace

La gestion inefficace des tâches est pointée du doigt par la CSST. «Ils n'avaient pas de moyens de détecter le non-respect des règles puisqu'aucun contremaître n'était sur place», explique M. Gilbert. «Il n'y avait pas de personne en autorité, poursuit-il. On parle d'une équipe autonome, un concept imprécis autant pour les travailleurs que pour l'employeur. On note un certain laisser-aller.»

En somme, si une personne en autorité avait planifié l'ensemble des opérations et si un signaleur avait accompagné M. Turgeon ce matin-là, cette tragédie n'aurait jamais eu lieu.