Coup de foudre à Chicoutimi

Doody Le Tigre, l'homme en jaune sur cette photographie, a établi le contact avec la foule venue l'entendre vendredi soir, au centre-ville de Chicoutimi.

L'un des charmes du Festival international des Rythmes du Monde réside dans son côté «blind date». Souvent, en effet, les gens ne consultent pas le programme. Ils se laissent guider par le hasard au moment de choisir un spectacle, ce qui produit des moments magiques comme celui qui est survenu vendredi soir, gracieuseté de Doody Le Tigre.


Il s'agissait de sa première apparition à Chicoutimi et on lui avait confié la scène située à l'angle des rues Racine et Labrecque. La nuit était tombée à son arrivée, sur le coup de 21h. L'air d'un premier de classe avec ses lunettes et son look propret, le Montréalais d'origine haïtienne avait tout à prouver à la foule qui s'était massée devant lui.

Elle était relativement âgée, ce qui laissait présager un accueil poli, mais sans plus. Or, l'homme n'a eu besoin que trois chansons pour établir le contact. Son répertoire, qui a un pied dans les Antilles et l'autre en Afrique, a contribué à ce succès. Pas autant, toutefois, que le charisme du chanteur.



Lui et ses complices en musique, dont un claviériste particulièrement inventif, venaient de livrer deux pièces plutôt rythmées et assez modernes, lorsqu'ils se sont attaqués à leur single d'il y a deux ans, Waka Waka Africa. C'est ce qui leur a permis de fermer la vente, après avoir mis le pied dans la porte.

Était-ce le dialogue entre le Tigre et sa choriste, mené avec entrain? Le tempo accéléré imposé par les synthés et les percussions? Les deux danseuses qui se sont démenées si joliment? Toujours est-il que le public s'est animé pour la peine et n'a plus regardé derrière.

Dès lors, les chansons ultralégères, mais au beat irrésistible, se sont enchaînées. Loco loco, Week-end, Chaleur des îles: vous voyez le genre. Des phrases du type, «Mademoiselle, voulez-vous danser?», il y en a eu à satiété. Par moments, on sentait une proximité avec la Compagnie Créole, un groupe que le Doody a déjà côtoyé sur scène.

Bien ou pas, l'essentiel est qu'un microclimat s'est installé sur ce tronçon de la rue Racine. Exit le vent et la petite fraîche. Les spectateurs, tous âges confondus, ont même tenté d'apprivoiser la danse du Tigre en suivant le rythme de Kokoye Ole, une chanson consacrée à la noix de coco, sujet existentiel s'il en est.



Un pas en avant, un pas en arrière et quatre de côté: il n'en fallait pas plus pour libérer les gens de leurs soucis, leur faire oublier leurs ennuis de santé, l'argent trop rare et les promesses électorales qui, elles, ne le sont pas assez. Léger? Que oui! Et pourquoi pas? Ça coûte moins cher qu'un psy et c'est meilleur pour les genoux.

Wesli, homme de peu de mots

En début de soirée, c'est une autre vision des Caraïbes qui s'est déployée sur la Racine, cette fois à l'angle de la rue Bégin. La grande scène a été occupée par Wesli, un Québécois d'origine haïtienne, tout comme Doody, qu'on retrouvait après une absence de quelques années.

Il y avait beaucoup de monde, mais moins que la veille, pour apprécier des compositions faisant la part belle au reggae. Excellent guitariste, Wesli a laissé parler son instrument, sans prendre la peine de mettre ses chansons en contexte. Dommage, parce qu'il a des choses à exprimer, une vision du monde à laquelle font écran ses textes en créole.

L'homme semblait de bonne humeur, pourtant, et son groupe affichait d'excellentes dispositions, ce qui ne représente pas un luxe lorsqu'il faut négocier avec les nombreux virages que prend la musique. Le public a apprécié, bien sûr. On a même vu les gens de la section VIP agiter des ballounes blanches, à un moment donné. Mais avec un petit coup de main, il aurait absorbé autre chose que des notes.

Dcote@lequotidien.com