Une erreur encore à corriger

Le maire de Saguenay,  Jean Tremblay

Avec raison diront certains (et à grands frais), notre ville célèbre en cette année 2012 le 10e anniversaire de la fusion. Comme une majorité de nos concitoyens, j'étais favorable à cette action car, du point de vue de la visibilité, du pouvoir de négociation auprès des instances supérieures, elle nous garantissait certains avantages.


Mais, avec raison aussi, la ville ne célèbre pas le 10e anniversaire du choix de son nom. Car, le nom qu'elle s'est choisi dans la plus grande confusion a été, et continue d'être, le résultat d'une grave erreur politique dans laquelle nos dirigeants ont entraîné notre population. Nos politiciens actuels et passés avaient le devoir de nous amener vers une plus grande unité. Ils ne l'ont pas fait. L'erreur est humaine. Les politiciens n'en sont pas à l'abri. Ce qui est pire encore que l'erreur, c'est l'entêtement à poursuivre dans l'erreur et à ne pas vouloir la corriger.

Je pourrais citer au moins une dizaine de personnalités du monde québécois, des férus d'histoire, qui ont dénoncé avec vigueur cette insulte qu'on a faite à ceux qui ont bâti cette région et à une très grande partie de nos citoyens. Je ne rappelle que cette phrase lapidaire lancée récemment par Serge Bouchard, de Montréal, le plus illustre de nos anthropologues québécois. Qualifiant le rejet du nom de Chicoutimi, il parlait d'une «profonde erreur de parcours», pour ne pas dire d'une véritable supercherie (réf. Québec-Science, déc. 2011-jan. 2012, p.50).



Unité?

Certains laissent croire que notre population n'a jamais été aussi unie et que l'esprit de clocher qui nous a tant nui est disparu de nos moeurs par la magie de la fusion. Cela est absolument faux. Ils le savent et nous le savons tous.

Cette unité dont on se vante n'est qu'une illusion. Les personnes lucides et sincères savent que l'unité ne saurait naître de la division. Au lieu de nous unir, le nom de Saguenay nous a grandement divisés. Obligés de l'utiliser, nos médias continuent de creuser le fossé profond entre l'usage qu'ils en font et celui qu'en fait la population elle-même dans son quotidien.

Il est vrai qu'à coup de festivals, de fêtes populaires, on peut créer une certaine effervescence, mais cela n'a rien à voir avec une véritable unité fondée sur le respect et la confiance mutuelle.



En marge du dernier spectacle en plein air présenté à La Baie, je m'en voudrais de ne pas commenter ce propos, disons-le carrément, insipide du maire Tremblay, tel que rapporté le lendemain dans Le Quotidien. «Si nous avions fêté Chicoutimi, nous ne pourrions pas dire aujourd'hui que nous avons une base militaire». Voilà un discours diviseur. Faire croire que le choix du nom de Chicoutimi aurait eu pour conséquence de nous priver d'une base militaire, relève de la plus basse démagogie. Je refuse de croire qu'une majorité puisse acheter pareil argument.

Jules César disait en son temps: «divise et règne». Voilà une maxime que le maire utilise à merveille. Depuis longtemps, il se fait le champion de la division, une stratégie vieille comme le monde, mais qui fonctionne parfaitement pour lui. Jamais, je crois, il n'aura assez de sensibilité pour mesurer toute la déception, l'amertume et la colère même que de tels propos suscitent dans une grande partie de notre population.

André-R. Gauthier,Président/Mouvement Chicoutimi-Saguenay