Le miracle du Vorarlberg est aujourd'hui connu dans toutes les écoles d'architecture de la planète. Il a fait l'objet de nombreuses publications dans les revues spécialisées sans compter les ouvrages complets traitant de la transformation d'une économie en utilisant une ressource qui avait perdu ses lettres de noblesse.
L'architecte Dominique Gauzin-Müller était de passage à Chicoutimi hier dans le cadre du troisième colloque de l'Institut des régions ressources sur le bois pour présenter cette réussite qui, à l'origine, a été initiée par un petit groupe d'individus qui a résisté aux dictats de la métropole.
Sur le plan historique, cette région regroupait les meilleurs ébénistes d'Europe: «les hommes quittaient les villages plusieurs mois par année pour se rendre dans les pays voisins», a raconté la conférencière.
La région était isolée sur le plan géographique et ce n'est qu'au début du 20e siècle qu'elle a été reliée par des réseaux routiers. Elle comptait de plus sur des ressources renouvelables avec l'hydroélectricité de telle sorte qu'elle a connu rapidement l'industrialisation jusqu'à ce que la crise du textile mette un terme à la prospérité.
Selon l'architecte, la relance économique de la région a été initiée par un groupe de jeunes, dont certains n'avaient pas de diplôme d'architecte, et qui ont décidé de se lancer dans la construction de maisons d'un nouveau genre en bois qui offraient des propriétés énergétiques pour faire face à ce climat de montagne. Au fil des ans, les boîtes de bois du début ont été améliorées et l'architecture s'est intéressée à cette nouvelle dynamique qui sortait des sentiers battus.
La nouvelle architecture des ces jeunes passionnés du bois n'avait rien de comparable à celle de leurs ancêtres ébénistes, mais misait beaucoup sur une construction simple basée sur des règles d'économie d'énergie sans pour autant minimiser le confort. Cette nouvelle architecture a rapidement débordé les frontières de l'Autriche.
«Dans le Vorarlberg, les sociétés construisent avec comme premier souci la qualité du travail bien fait et l'objectif de voir leur réalisation primée en architecture. Il y a cette volonté des gens de bien faire les choses», reprend Dominique Gauzin-Müller.
Sur le plan politique, il y a également des similitudes puisque ce land n'a pas bénéficié d'une aide de l'État fédéral pour articuler sa relance. Ce sont des subventions de l'Union européenne qui ont été utilisées en soutien à certaines communes du land qui étaient dans une situation très difficile.
Modèle
L'architecte croit que le modèle du Vorarlberg peut être en partie importé dans une région comme le Saguenay-Lac-Saint-Jean qui a vu son économie forestière dévastée.
«Le Saguenay-Lac-Saint-Jean est une région au même titre que le Vorarlberg. Les gens d'ici ne pensent pas comme ceux de la métropole. Vous avez aussi des ressources renouvelables avec l'hydroélectricité et la matière première abondante semblable à celle du Vorarlberg (sapin, épinette)», constate la spécialiste.
Elle en arrive à la même conclusion que le président de l'Institut des régions ressources Adam Lapointe quant au fait que le bois est un matériau d'avenir.
Le bois est un matériau qui pousse à l'état naturel et repousse lorsqu'il est coupé. Il fait partie de l'équation pour la réduction des gaz à effets de serre sur la planète et nécessite beaucoup moins d'énergie que l'acier et le béton avant qu'il puisse être utilisé dans les structures.